En toute distinction

Force est de constater qu’avec certaines personnalités, le pire semble être toujours à venir. Caroline Fourest, s’exprimant sur les enfants morts à Gaza, est de celles-là.

Sébastien Fontenelle  • 31 octobre 2023
Partager :
En toute distinction
Caroline Fourest lors du Forum Génération Égalité, au Carrousel du Louvre à Paris, le 30 juin 2021.
© Ludovic MARIN / AFP

Il y a des personnalités dont on se dit qu’on les connaît par cœur, qu’on les sait depuis longtemps capables des plus incommodantes proférations, et qu’on les a déjà entendues débiter tant de bêtises et de méchancetés que jamais elles ne pourront descendre plus bas dans la bassesse.

Et pourtant : si. Pourtant, force est de constater qu’avec ces caractères-là le pire semble être toujours à venir.

Ce 29 octobre, par exemple, l’éditocrate Caroline Fourest, qui était encore invitée à donner, sur BFMTV, son avis sur ce qui se passe à Gaza, a dénoncé ce qu’elle appelle, je cite, « cette relativisation qui essaie de renvoyer dos à dos les victimes » israéliennes et palestiniennes « sans tenir compte des intentions et du contexte ». Ce qu’entendant, on pressentit que ce préambule annonçait une suite émétique. Et, de fait, Fourest a déclaré – pardon de citer un peu longuement : « On ne peut pas comparer le fait d’avoir tué des enfants délibérément en attaquant, comme le fait le Hamas, et le fait de tuer des enfants involontairement, en se défendant, comme le fait Israël. »

Car, a-t-elle ensuite ajouté dans une syntaxe un peu approximative : « Refuser cette distinction intellectuelle et morale entre l’intention de tuer pour attaquer quelqu’un en raison de qui il est – ce qui est un acte raciste, ce qui est un pogrom – et, encore une fois, bombarder pour se défendre au risque de tuer des civils, ce n’est pas la même démarche, ça n’est pas la même intention, et c’est normal que ça n’entraîne pas exactement les mêmes réactions, […] parce que ce n’est pas la même chose, en réalité. »

On peut éprouver, lorsqu’on se trouve confronté·e à de tels énoncés, un peu de difficulté à se contenir.

On peut éprouver, lorsqu’on se trouve confronté·e à de tels énoncés, un peu de difficulté à se contenir. À ne pas céder à la colère et au dégoût. À ne pas lâcher, même, une ou deux grossièretés. À ne pas hurler de rage, quoi.

En de tels moments, des chiffres peuvent être de quelque secours et de quelque utilité. Comme ceux, parmi d’autres, qui nous rappellent qu’à la date du 19 janvier 2009 des bombardements israéliens – qui duraient depuis le déclenchement, trois semaines plus tôt, de l’opération « Plomb durci » – avaient déjà tué à Gaza plus de 1 300 Palestinien·nes, dont plus de 400 enfants. Ou comme ceux qui nous remémorent qu’à la date du 29 juillet 2014 des bombardements israéliens – qui duraient depuis le déclenchement, 21 jours plus tôt, de l’opération « Bordure protectrice » – avaient déjà tué à Gaza plus de 1 100 civil·es palestinien·nes, dont 230 enfants.

Ou, enfin, comme ceux qui nous révèlent que, dans le cours des trois dernières semaines, plus de 3 000 enfants – au jour où ces lignes sont écrites – ont encore été tués à Gaza.

C’est ce dernier massacre en date que Caroline Fourest, manifestement insensible à la réalité que révèlent ces abominables statistiques à répétition, regarde comme une tuerie involontaire, où les enfants assassinés l’auraient donc été contre le gré de leurs meurtriers : sans doute ceux-ci sont-ils, comme elle, de délicats et sensibles experts ès « distinction intellectuelle et morale ».

Recevez Politis chez vous chaque semaine !
Abonnez-vous
Publié dans
De bonne humeur

Sébastien Fontenelle est un garçon plein d’entrain, adepte de la nuance et du compromis. Enfin ça, c’est les jours pairs.

Temps de lecture : 3 minutes
Soutenez Politis, faites un don.

Chaque jour, Politis donne une voix à celles et ceux qui ne l’ont pas, pour favoriser des prises de conscience politiques et le débat d’idées, par ses enquêtes, reportages et analyses. Parce que chez Politis, on pense que l’émancipation de chacun·e et la vitalité de notre démocratie dépendent (aussi) d’une information libre et indépendante.

Faire Un Don