« Arracher à une actrice des choses qu’elle n’a pas envie de donner est odieux »

À la suite des propos de Judith Godrèche, Axelle Ropert, réalisatrice et féministe, analyse les graves dysfonctionnements qui affectent le cinéma.

Christophe Kantcheff  • 15 février 2024
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« Arracher à une actrice des choses qu’elle n’a pas envie de donner est odieux »
"On peut faire des chefs-d’œuvre dans une atmosphère d’empathie, de douceur et de respect. Quelle pauvre conception de l’art que de mesurer la créativité au sadisme dont on peut faire preuve !"
© Claire Nicol

En raison du contenu de ses propos mais aussi par l’éclatante humanité qui émane d’elle, Judith Godrèche a bouleversé toutes celles et tous ceux qui l’ont entendue récemment s’exprimer. Au-delà des comportements de Benoît Jacquot et de Jacques Doillon, contre lesquels elle a déposé plainte pour viol sur mineure, sa parole jette une lumière crue sur une certaine réalité du cinéma français qui met en péril au premier chef les actrices.

Réalisatrice de quatre longs métrages – dont le dernier, La Petite Solange, avait pour protagoniste une adolescente –, féministe revendiquée, hautement cinéphile et coprésidente de la société des réalisatrices et réalisateurs de films (SRF), Axelle Ropert s’exprime ici en son nom propre et livre une analyse précise, empreinte de sa propre expérience, des graves dysfonctionnements qui affectent le cinéma. Elle évoque les limites nécessaires du pouvoir du metteur en scène et se prononce contre la censure des œuvres.

Comment avez-vous reçu les propos de Judith Godrèche ?

Axelle Ropert : Le véritable #MeToo du cinéma français est en train de se jouer en ce moment. Il avait un peu commencé avec l’affaire Adèle Haenel/Christophe Ruggia. Mais d’une certaine façon, cela restait isolé, sans répercussions sur le reste de l’industrie du cinéma. Avec Besson, c’est plutôt le pouvoir de l’argent sur les actrices qui a été attaqué – mais sans vrai chamboulement. En revanche, avec les affaires Depardieu et Benoît Jacquot, on assiste à un bouleversement de fond.

Depuis toujours on sait que les actrices sont sujettes à des violences sexuelles.

Selon des modes plus « artistiques » et donc plus difficile à dénouer : on a dû travailler nos admirations et nos « mythes ». Avec Depardieu, on a été soudain confronté à un cas particulier : comment un artiste pour lequel on a la plus grande admiration peut se conduire de la façon la plus répréhensible qui soit ? Moi qui condamne sans hésiter les violences sexistes et sexuelles (VSS), j’ai dû faire un travail sur moi-même pour me défaire de cette admiration qui faisait obstacle.

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En ce qui concerne Benoît Jacquot et Judith Godrèche, c’est autre chose : la destruction du mythe de « muse/artiste » qui a longtemps empoisonné l’histoire de l’art. Depuis toujours on sait que les actrices sont sujettes à des violences sexuelles, cela fait 25 ans que je le sais. Et pendant longtemps nous n’étions pas très nombreux à prendre position sur ce sujet. Dans le cas de Benoît Jacquot, il ne s’agit pas seulement de violences sexuelles, mais d’un comportement de tortionnaire, d’un sadisme inouï. Tout d’un coup, ça donne une radicalité au phénomène des violences sexuelles qui, malheureusement, ne suscitait encore que trop peu de réactions. Les propos de Judith Godrèche déjouent un mythe, qui n’a jamais été le mien, mais qui a été très fort dans le cinéma, celui du créateur Pygmalion et de sa muse – le premier, en réalité, broyant la seconde en lui promettant la « beauté » sur les écrans.

Pourquoi le cinéma, français en l’occurrence, favorise-t-il les comportements d’agresseurs ?

Les agresseurs trouvent dans le cinéma le milieu parfait pour donner libre cours à leur violence. Pour plusieurs raisons. La plus simple : le cinéma est un endroit de pouvoir où les règles de la domination qui régissent la société sont multipliées par dix. Règles de pouvoir au summum, et aussi un domaine de non-droit : le pire du pire en somme. Dans le cinéma mainstream, l’argent protège les agresseurs. Dans le cinéma d’auteur, c’est tout aussi violent mais plus retors. Ce type de comportement est protégé au nom de l’art et de la figure de l’artiste tout puissant. Beaucoup de gens se sont leurrés, ou ont accepté d’être leurrés, parce qu’ils voyaient Jacquot et Doillon comme des cinéastes avec un grand C.

Dans le cinéma mainstream, l’argent protège les agresseurs. Dans le cinéma d’auteur, c’est tout aussi violent mais plus retors.

J’ajouterais que certains de leurs films attestaient pourtant d’un problème pour qui n’était pas dupe. Dans Pas de scandale, de Benoît Jacquot, j’ai tout de suite vu que quelque chose n’allait pas avec le personnage de la jeune fille interprétée par Vahina Giocante, filmée avec complaisance comme la proie d’adultes.  De même que le projet de cinéma de La Femme qui pleure, de Jacques Doillon, qui consiste à faire pleurer une actrice pendant 1 heure 30 devant une caméra, est problématique et m’avait dégoûtée.

Plus largement, beaucoup de personnages féminins sont peu valorisés, passifs, dominés…

La qualité d’un personnage féminin n’est pas liée au sort, heureux ou malheureux, qu’il connaît à l’écran. Mizoguchi, par exemple, a mis en scène beaucoup de personnages de prostituées qui ne s’en sortent pas. Elles ne sont pas des femmes « puissantes » – terme dont je me méfie un peu. Elles sont au contraire accablées par le malheur. Mais la grandeur de la mise en scène et la qualité du regard que le cinéaste pose sur elles font que ce sont de grands personnages.

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C’est la mise en scène qui donne de la grandeur à un personnage féminin, pas seulement le scénario. Par ailleurs, qu’il y ait une part de sadisme dans le cinéma vis-à-vis des actrices et des personnages féminins, c’est évident. Innombrables sont les femmes pleurant à l’écran, violées, battues, effrayées, spectacle dont on tire un plaisir à interroger… On ne s’est pas suffisamment interrogé sur la répétition de ce type de scènes : quel obscur affect veut-on susciter ainsi chez les spectateurs ?

Jacquot et Doillon se réclament de l’héritage de la Nouvelle Vague. Celle-ci leur aurait-elle légué leur part sombre ?

Je ne suis pas d’accord avec cette filiation hâtive. La Nouvelle Vague n’a jamais promu la figure du ‘grand artiste narcissique’ ayant tous les droits, mais a affirmé la prééminence de la mise en scène sur tout – c’est tout à fait différent. Certes, Truffaut a certainement été pénible avec certaines actrices (je pense à Adjani pour Adèle H), mais je ne vois rien de cet ordre-là chez Chabrol, Rohmer ou Rivette. Pas du tout. C’est leur supposée descendance qui a déconné et qui a confondu l’affirmation du pouvoir de la mise en scène avec l’exercice d’un pouvoir délétère sur les actrices. Je dirais que la violence sur les jeunes actrices et leur érotisation a été érigée par un certain cinéma depuis les années 1980 : pensons aux sorts de Valérie Kaprisky, Maruschka Detmers, Julie Delpy, et quelques années plus tard Judith Godrèche et ses consœurs.

Prenons Rohmer : il a tourné avec nombre de jeunes comédiennes. Dans un livre paraissant ces jours-ci, Au travail avec Éric Rohmer (1), plusieurs d’entre elles sont interrogées aujourd’hui. Aucune ne parle de comportement répréhensible de sa part…

1

Au travail avec Éric Rohmer, Victorien Daoût, Capricci, 302 p., 23 euros.

Rohmer aimait beaucoup la compagnie féminine, la compagnie des jeunes actrices. C’était un moment d’observation pour lui dans le but de créer ses personnages et de se mettre à rêver son film. Mais cela s’arrêtait à de longues conversations devant des tasses de thé. Cela dit, un cinéaste peut avoir des fantasmes sexuels, y compris des fantasmes dégradants, mais tant qu’il n’en fait pas état à l’actrice et qu’il ne cherche pas à ce que celle-ci s’y soumette, tout va bien. Bien sûr qu’on peut faire de la mise en scène avec des fantasmes. Il faut simplement les garder pour soi et travailler la sublimation !

Les agresseurs n’ont pas une ‘libido débordante’, ils ont juste un problème de violence et de domination.

J’ajouterai ceci : je ne suis pas sûre que ce soit tant une question de « sexualité » que de violence pure et dure. De nombreuses activistes féministes militent pour qu’on substitue le terme de « crimes de violence » à celui de « crimes sexuels ». Je trouve moi aussi qu’il est trop facile d’invoquer la sexualité. Il n’y a pas d’un côté des cinéastes hommes qui auraient une libido débordante et une sexualité très forte, et les cinéastes femmes qui en seraient privées et seraient chastes. Les agresseurs n’ont pas une « libido débordante », ils ont juste un problème de violence et de domination – il faut désexualiser la question et la repolitiser.

Ne pensez-vous pas que la vision en France de ce qui relève de la création reste profondément empreinte de romantisme, qui implique de la souffrance et du chaos ? Maurice Pialat en est un des plus grands symboles…

Dans le milieu du cinéma, la souffrance au travail est en effet valorisée. La figure du metteur en scène torturé doit beaucoup à la littérature et à la représentation du poète maudit du XIXe siècle. Et, en effet, la méthode de travail de Pialat, réalisateur si important pour beaucoup de cinéastes – mais pas pour moi – avec sa violence, ses colères et ses processus d’humiliation, a été stupidement considérée à partir des années 1990 comme un mécanisme exemplaire de création. Avec lui, ce n’est pas tant le mythe de l’artiste torturé qui emmerde tout le monde avec ses états d’âmes que le mythe du plateau comme « chaudron de tortures ».

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Je pense que Pialat lui-même, qui était plus intelligent que cela, n’affirmait pas une telle idée. Il n’a jamais dit : violence sur un plateau = création artistique. Ce mythe a été très polluant pour les gens de ma génération et celle qui nous a précédés. Je me souviens que quand j’ai commencé à faire des films, comme j’étais douce et tranquille sur le plateau, on me disait : « Tu n’es pas assez exigeante ! » Un jour, une actrice a même appelé son agent pour lui dire que je ne lui faisais pas faire assez de prises et que je lui parlais trop gentiment !

On raconte qu’à l’époque où Fellini était journaliste, faisant des reportages sur les plateaux de cinéma à Cinecittà, il était habitué au capharnaüm qui y régnait, aux cris des réalisateurs. Un jour, il arrive sur le tournage d’un film de Rossellini, et là, il est fort étonné parce que tout est calme…

Dans la création artistique domine l’idée d’une logique sacrificielle. À savoir, par exemple, qu’une actrice livre son corps ou sa psyché à un metteur en scène, qui, lui, donne forme à ce sacrifice en réalisant un beau film. Ça va de L’Important c’est d’aimer à des films actuels. Je trouve cette idée d’une débilité totale. On peut faire des chefs-d’œuvre dans une atmosphère d’empathie, de douceur et de respect. Quelle pauvre conception de l’art que de mesurer la créativité au sadisme dont on peut faire preuve ! Sur un plateau de Jacques Tourneur, qui a fait des films sublimes comme La Féline, non seulement il ne fallait pas parler fort, mais il fallait chuchoter ! L’art est affaire de vision intérieure pour moi, pas d’exercice de la torture : ça ne m’intéresse pas de voir la souffrance premier degré d’une actrice à l’écran, mais avoir accès à la vision haute d’un metteur en scène, oui.

Une précision à propos du pouvoir : sur un tournage, une équipe de film est très hiérarchisée, avec à son sommet la ou le cinéaste. C’est elle ou lui qui décide…

Oui, la mise en scène et tout le processus de réalisation d’un film ont un.e auteur.e : la ou le cinéaste. La création ne relève pas de prises de décision égalitaires et démocratiquement discutées, je n’y crois pas du tout. Mais l’exercice de la création ne signifie pas exercice d’un pouvoir aberrant. Ce qui est stimulant, ce n’est pas d’être à égalité avec le cinéaste, mais de mettre en forme des consignes artistiques passionnantes. Sur un plateau, les techniciens ne réclament pas d’être placés au même niveau que le metteur en scène. Ils sont en demande d’être respectés. Quand le metteur en scène a les idées claires, sait ce qu’il veut, et met au diapason tout le monde, le travail est loin d’être vécu comme un asservissement.

Vous avez vous-même, pour votre dernier film en date, Petite Solange (2021), tourné avec une adolescente de 14 ans, Jade Springer. Vous disiez qu’elle était très pudique, ce qui oblige, pour suggérer certains sentiments, à faire preuve d’inventivité dans la mise en scène, davantage que si vous aviez pu filmer directement telle ou telle scène…

Arracher à une actrice des choses qu’elle n’a pas envie de donner, en particulier quand elle est mineure, est odieux. C’est une question d’éthique pour moi. Cela me dégoûterait d’obtenir une scène sexuelle à une jeune fille qui n’a pas envie de la jouer. Ou de la manipuler pour qu’elle y arrive. C’est de l’extorsion, cela n’a rien à voir avec l’art. La mise en scène, selon moi, consiste non pas à filmer frontalement ou à extorquer par la force des choses,  mais, par le détournement, parvenir à retrouver une vérité.

Quand je sens dans un film qu’une actrice a cédé quelque chose malgré elle, je déteste. J’ai l’impression de voir un viol en direct.

Quand je sens dans un film qu’une actrice a cédé quelque chose malgré elle, je déteste. J’ai l’impression de voir un viol en direct. En outre, toute cette « école » a produit nombre de films très paresseux. Même Abdellatif Kechiche, qui n’est pourtant pas un mauvais cinéaste, quand il fait pleurer une actrice soixante fois pour qu’elle joue une scène, bien sûr qu’il arrive à quelque chose : il l’a fait pleurer soixante fois ! Mais où est l’art là-dedans ? Est-ce que ce n’est pas tout simplement l’épuisement d’une actrice à bout de nerf qu’il filme ?

Les limites ou les contraintes obligent à trouver des subterfuges pour faire sentir des choses. Je n’érige pas la métaphore au rang de dogme, et parfois, des plans filmés frontalement peuvent être magnifiques. Mais filmer de manière indirecte oblige à érotiser différemment les scènes. J’ai vu récemment une petite merveille, Child of Divorce, de Richard Fleischer, un mélo familial de 1946 dont le personnage central est une petite fille : avec des méthodes de studio américains hyper codifiées, il a pourtant su obtenir une émotion extraordinaire chez cette petite fille…

Aviez-vous affaire aux parents de votre jeune actrice ? Ce que rapporte Judith Godrèche montre qu’elle n’a pas été du tout entourée par les siens quand elle était sous l’emprise de Benoît Jacquot.

Les parents de mon actrice venaient la chercher au début et à la fin de la journée de travail. Dès qu’il y avait un dépassement d’heures, nous les prévenions. C’était inenvisageable de faire ce que nous voulions avec cette jeune fille de 14 ans. Les plateaux de cinéma avec présence de mineurs sont très surveillés par la DASS désormais. En ce qui concerne Judith Godrèche, nous étions dans les années 1980, avec un certain laisser-faire. C’est poignant d’ailleurs de lire les affinités avec la solitude de Vanessa Springora livrée à Matzneff dans Le Consentement. C’était une époque où la « jeune fille » n’était que la cible passive de fantasmes érotiques pénibles, et pas du tout un « être de droit » comme aujourd’hui.

La féminisation de la corporation des cinéastes depuis les années 2000 n’a-t-elle pas amélioré les choses ?

Cette féminisation fait beaucoup de bien au cinéma français. Cela casse la mécanique du chantage sexuel et de la violence. Les femmes ne s’y prêtent pas. Non parce qu’elles sont moins sexuées que les hommes. Mais parce qu’elles ont appris à exprimer leur désir différemment : pas par le viol, l’appropriation, etc. Elles ne mettent pas leur pouvoir dans l’extorsion à une actrice de gestes ou de sentiments.

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Pour autant, les archaïsmes sont encore très profonds et difficiles à déjouer. Le travail n’est pas encore fait. Par exemple, autour de moi, j’entends beaucoup dire : quand #MeToo aura fini de nettoyer le cinéma français, qu’est-ce qu’on va s’ennuyer ! Selon les réacs du cinéma, une forme d’hygiénisation morale et esthétique dommageable du cinéma serait à l’œuvre. Ils confondent « moralisme » et « éthique », « domination » et « subversion ».  Il y a beaucoup de résistance cachée.

Des mesures ont été prises par les pouvoirs publics qui témoignent que les choses bougent : la favorisation de l’embauche de femmes sur les tournages, l’existence d’un référent harcèlement (même si ce n’est pas encore obligatoire), la formation aux VSS des professionnels…

Ce sont des progrès, et il y en aura encore davantage. En particulier grâce aux nouvelles générations, qui sont très vigilantes sur les questions féministes. À la SRF, dont je suis la coprésidente cette année, nous soutenons le CNC dans sa volonté d’imposer des formations aux VSS aux cinéastes, qui jusqu’ici n’y étaient pas soumis. Mais si, sur les mœurs, je suis optimiste, je le suis moins sur d’autres plans, sur des plans « concrets » notamment. Par exemple : pourquoi les femmes cinéastes ont-elles si peu accès aux gros budgets ? Pourquoi n’y a-t-il quasiment aucune cheffe opératrice sur des films de la lourde industrie ?

Les cinq grands festivals ont des hommes à leur tête. Pourquoi ?

Dans le rapport à l’argent, rien ne bouge. Et pourquoi est-ce si compliqué pour les femmes d’être sélectionnées dans les festivals ? Il faut savoir que les cinq grands festivals (de catégorie A) ont des hommes à leur tête. Pourquoi ? Quand je vois que ce sont désormais des femmes qui dirigent les grandes centrales syndicales françaises, je me dis que ce qui est de l’accès au pouvoir concret, on a encore des choses à faire…

Doit-on continuer à diffuser ou programmer les œuvres des cinéastes agresseurs, présumés ou condamnés ?

J’en ai assez qu’on renvoie les féministes à la censure (ou « cancellation »). En fait, le terme « féministes » est trop général, c’est comme si on disait « gens de gauche » dès qu’on ne parle pas de la droite. Il y a plein de courants à gauche, de même que parmi les féministes, il y a plein d’écoles différentes. La censure des œuvres n’est pas du tout une obsession féministe, en revanche manifester par des actes spectaculaires de la colère, oui ! Je suis pour qu’on continue à montrer toutes les œuvres, quitte à ce qu’elles soient accompagnées d’un carton d’explication ou de contextualisation, et que le public décide par lui-même en son âme et conscience. Montrer des œuvres dont l’auteur est problématique donc, mais s’abstenir peut-être de  faire des hommages.

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La Cinémathèque française peut programmer tous les Polanski sans forcément créer un événement autour de sa personne. Je vois le fait d’aller manifester devant la Cinémathèque parce qu’il y a une rétrospective Polanski et un hommage qui lui est rendu comme une expression salutaire de colère. N’oublions pas que la supposée « violence féministe » (qui n’a pourtant jamais fait de morts dans l’histoire du monde, contrairement à la violence masculine) est une riposte à la violence reçue. Et une riposte pensée, structurée, maîtrisée. Judith Godrèche n’a pas répondu par un coup de poing, mais par une série télé sur Arte (1), des textes et la livraison d’un récit précis. C’est impressionnant comme travail de pensée.

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Icon of French Cinema, à voir sur arte.fr.

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