« Revanchard, Donald Trump s’est radicalisé »

Malgré l’attaque du Capitole, les affaires judiciaires, les défaites électorales, Donald Trump reste le grand favori des primaires républicaines pour la présidentielle. Laure Pallez, coauteure d’un livre sur Ron DeSantis, son ex-rival à droite, analyse son retour.

Alexis Buisson  • 12 février 2024
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« Revanchard, Donald Trump s’est radicalisé »
Le convoi "Take Our Border Back" des supporters de Donald Trump, près de la frontière entre le Mexique et les États-Unis à San Ysidro, en Californie, le 3 février 2024.
© David SWANSON / AFP

Donald Trump rêve de prendre sa revanche sur Joe Biden en novembre prochain. Laure Pallez, coauteure avec Flore Kayl de Ron DeSantis, le nouvel homme fort de la droite américaine (VA Éditions), une biographie du gouverneur de Floride et ex-rival de l’homme d’affaires pendant les primaires, revient sur la candidature du perdant de 2020, favori pour décrocher l’investiture républicaine, malgré la liste interminable des affaires qui lui collent aux basques.

En quoi le Donald Trump de 2024 est-il différent de celui de 2020 ?

Laure Pallez : En 2020, tout en progressant de neuf millions de voix par rapport à 2016, il a perdu l’élection présidentielle dans des conditions qu’il estime douteuses. Depuis ce moment-là, il cherche à prendre sa revanche. Il s’est donc radicalisé. Un autre facteur explique son changement de comportement : les affaires judiciaires. Il faut se rappeler qu’en mars 2023, il était au plus bas dans les sondages. C’était le gouverneur de Floride, Ron DeSantis, qui était vu comme le futur du parti. Trump était au contraire considéré comme l’homme qui embarrassait son camp !

Le Parti républicain est bloqué avec cet homme qui était un accident de l’histoire en 2016.

Lors des élections parlementaires de mi-mandat de 2022, les candidats qu’il a soutenus ont d’ailleurs été battus dans les urnes. Mais la litanie des affaires a attisé l’envie de revanche de sa base et changé la donne. Politiquement, la justice lui a fait un cadeau. Et maintenant, le Parti républicain est bloqué avec cet homme qui était un accident de l’histoire en 2016. En effet, Donald Trump n’est pas un candidat républicain naturel. Il ne s’inscrit pas dans la tendance conservatrice traditionnelle. Rappelons qu’il a été membre du Parti démocrate entre 2001 et 2009 et qu’il était favorable à l’avortement dans le passé.

Comment expliquer le soutien dont il continue à bénéficier ?

Son électorat a plusieurs composantes. Il y a la frange radicale, qui croit que l’élection a été volée et parle du « régime Biden » comme si c’était une dictature. C’est elle qui menaçait de pendre le vice-président Mike Pence après l’attaque du Capitole, le 6 janvier 2021, alors qu’il cherchait à prendre ses distances vis-à-vis du président sortant. Par ailleurs, il y a ceux, plus modérés, qui estiment que le scrutin de 2020 a été entaché d’irrégularités et qu’il y a eu des manquements démocratiques, comme des électeurs qui n’ont pas eu à montrer de pièces d’identité au bureau de vote dans des circonscriptions clés. Ils veulent prendre leur revanche en 2024 mais voteront pour un candidat moins controversé en 2028.

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Enfin, il y a des déçus de Joe Biden qui se demandent si le Démocrate est apte à diriger le pays. Ils se disent que la réforme fiscale de Donald Trump, qui a instauré des baisses d’impôts pour les entreprises et les ménages, n’était pas si mauvaise. Que ses positions isolationnistes et antimondialistes étaient plutôt bonnes compte tenu de la paralysie des chaînes logistiques pendant la crise du covid. Certes, on entend beaucoup dire que l’économie américaine est dynamique sous Biden, mais quand on regarde de plus près, on se rend compte que le prix moyen des maisons augmente, de même que les taux d’intérêt. Le tout sur fond d’inflation.

La démocratie américaine est certainement la plus aboutie et équilibrée.

Or, on sait à quel point l’acquisition d’un logement, véritable assurance tout risque aux États-Unis, est importante. Il ne faut pas non plus ignorer le contexte international. Les États-Unis sont engagés sur plusieurs fronts. Trump, malgré ses défauts, incarne aux yeux de nombreux Américains l’image du président « chef de guerre ».

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Donald Trump est-il une menace pour la démocratie ou le danger qu’il représente est-il exagéré ?

Il est difficile de répondre à cette question. Trump est moins respectueux des institutions et de la constitution que son ancien rival des primaires, Ron DeSantis, qui a pris ses distances par rapport à la thèse du « vol » de l’élection de 2020. D’aucuns pourraient aussi dire que les tentatives d’États, comme le Colorado, pour empêcher Donald Trump de se présenter parce qu’il aurait participé à une « insurrection » le 6 janvier 2021 alors qu’il n’a pas encore été jugé, ne sont pas conformes aux exigences démocratiques et qu’il faudrait mieux laisser la population s’exprimer dans les urnes. Une chose est sûre : la démocratie américaine est certainement la plus aboutie et équilibrée. On l’a vu après l’attaque mortelle du Capitole, qui a marqué les esprits. Les institutions ont résisté à cet événement gravissime. Elles sont solides.

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