Netanyahou et la stratégie de la guerre généralisée
Le premier ministre israélien, dans une fuite en avant militariste, pousse le Moyen-Orient vers un cataclysme dont personne ne sortirait indemne. Les voix doivent s’élever pour tirer la sonnette d’alarme.

© Jack GUEZ / AFP
En moins d’une semaine, le Moyen-Orient a sombré dans une spirale d’escalade militaire vertigineuse. Israël, sous la direction de Benyamin Netanyahou, a frappé simultanément l’Iran, Gaza, la Syrie, le Liban et le Yémen. Une série d’attaques coordonnées, d’une intensité sans précédent depuis des années, dessine le visage d’un premier ministre qui ne cherche plus à contenir, mais à embraser. Netanyahou ne veut plus simplement défendre Israël : il veut une guerre généralisée.
Netanyahou met en danger non seulement les populations civiles des pays visés, mais aussi les citoyens israéliens eux-mêmes.
Son objectif n’est pas seulement militaire. Il est aussi, surtout, politique : dans le fracas des bombes, dans le tumulte régional, Netanyahou poursuit l’annexion rampante de la Cisjordanie. Occupation, colonisation, judiciarisation à marche forcée : chaque attaque hors des frontières permet d’invisibiliser un peu plus la dépossession quotidienne des Palestiniens en Cisjordanie. La guerre à l’extérieur sert de rideau de fumée à la politique de dépossession à l’intérieur.
Mais cette fuite en avant n’est pas sans conséquences. Elle met en danger non seulement les populations civiles des pays visés, mais aussi les citoyens israéliens eux-mêmes, exposés à une riposte régionale d’une ampleur inédite – même si l’on doute des capacités de l’Iran à riposter à même hauteur. Plus encore, Netanyahou prend en otage les populations de confession juives du monde entier, qui peuvent devenir les cibles collatérales d’une colère grandissante dans les opinions publiques. En amalgamant sa politique agressive à la survie d’un peuple, il joue avec un feu identitaire et moral d’une gravité extrême.
L’hypocrisie des puissances occidentales est à la hauteur de leur complaisance : critiquer sans condamner, condamner sans agir.
L’attaque contre l’Iran a ravivé une tension diplomatique inattendue, cette fois avec Washington. Car derrière cette frappe, c’est un autre théâtre qui se dessine : celui des désaccords entre Netanyahou et Trump. Le président américain mène des négociations avec l’Iran sur la relance d’un accord de non-prolifération nucléaire. Une rencontre est même prévue ce week-end à Oman. Netanyahou semble vouloir faire échouer toute tentative d’apaisement. Il saborde la diplomatie au profit de l’escalade. Il choisit la guerre plutôt que la négociation, l’isolement plutôt que l’équilibre.
Silence arabe
Et que dire des pays arabes ? Leur silence interroge. Hormis quelques condamnations feutrées, aucune réponse politique à la hauteur n’a été formulée. Des drones iraniens ont même été interceptés par Israël dans l’espace aérien de l’Arabie saoudite. Pourtant, les leviers existent : en jouant sur les prix de l’énergie, en soutenant une hausse du dollar, ils pourraient exercer une pression économique massive sur Israël et sur ses soutiens. Mais la division du monde arabe, les intérêts croisés, freinent toute réaction à la mesure du choc.
Face à cette flambée, les grandes puissances occidentales offrent un spectacle de cynisme glacé. Officiellement, elles déplorent « l’instabilité régionale » ou « la perte de vies civiles ». Mais dans les couloirs feutrés du pouvoir, nombreux sont ceux qui se réjouissent de voir l’Iran affaibli, ses installations nucléaires endommagées, son ambition régionale freinée. Leur hypocrisie est à la hauteur de leur complaisance : critiquer sans condamner, condamner sans agir.
Le monde assiste à une bascule dangereuse. Benyamin Netanyahou, dans une fuite en avant militariste, pousse le Moyen-Orient vers un cataclysme dont personne ne sortirait indemne. Le devoir des voix libres, des sociétés civiles, des diplomaties responsables est de tirer la sonnette d’alarme. Avant qu’il ne soit trop tard.
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