Une diplomatie illisible

Les pas de clerc de l’administration Obama donnent une impression de confusion.

Denis Sieffert  • 5 novembre 2009 abonné·es

Voici deux mois encore, la nouvelle diplomatie américaine s’était distinguée courageusement en exigeant d’Israël un gel total de la colonisation. Barack Obama, lui-même, avait placé cette exigence au cœur de son discours historique du Caire, le 4 juin dernier. Les États-Unis en avaient fait la condition à la reprise des négociations. Logique, puisque la colonisation des territoires occupés ruine par avance toute solution qui pourrait naître d’une négociation future. Rappelons que cette exigence figurait aussi, à mots à peine couverts, dans les accords d’Oslo, de septembre 1993, et qu’en dépit de cet engagement israélien le nombre des colons a, depuis lors, plus que doublé. Or, voilà que devant l’intransigeance israélienne, non seulement l’administration Obama est restée muette pendant plusieurs semaines, mais elle vient d’opérer, samedi, une spectaculaire volte-face. Et c’est la secrétaire d’État, Hillary Clinton elle-même, qui a pris le tournant en se déclarant favorable à la reprise des négociations « au plus vite et sans condition ».

Ce retournement est évidemment accueilli triomphalement par le Premier ministre israélien, Benyamin Netanyahou. Délibéré ou non, le changement d’attitude américain agit comme un piège pour les Palestiniens. Ceux-ci, adossés sur la position américaine, avaient refusé toute reprise des négociations tant que la colonisation se poursuivrait. Abandonnés par Hillary Clinton, ils se retrouvent aujourd’hui isolés. Une fois de plus, ils sont montrés du doigt par la secrétaire d’État, et dénoncés par Israël. « Impossible de poursuivre des négociations pendant qu’Israël modifie la donne sur le terrain et préjuge leur résultat en construisant » , a déclaré dimanche l’ancien ministre Ziad Abou Zayyad, pour qui « l’attitude de l’administration d’Obama est une énorme déception ». En fait, Benyamin Netanyahou jouent sur une ambiguïté classique dans le discours israélien : il promet une suspension de la construction de nouvelles colonies en Cisjordanie, mais assure que son pays va poursuivre l’expansion des colonies déjà existantes. Ce qui fait peu de différence sur le terrain pour les Palestiniens. Et c’est cette argutie bien connue que Mme Clinton fait mine de croire. La question est maintenant de savoir combien de temps Mahmoud Abbas, le président de l’Autorité palestinienne, va pouvoir tenir dans son refus.

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