Les exécutifs de la discorde

Les formations du Front de gauche et le NPA divergent sur la stratégie et tiennent désormais des réunions séparées. Les discussions ne sont pas pour autant rompues, notamment en régions.

Michel Soudais  • 19 novembre 2009 abonné·es
Les exécutifs de la discorde

L’accord était à portée de main. Il n’a pourtant pas pu se faire. La réunion du 10 novembre entre le Parti communiste français (PCF), le Parti de gauche (PG), la Gauche unitaire (GU), les Alternatifs, la Fédération pour une alternative sociale et écologique (FASE), le Nouveau Parti anticapitaliste (NPA), le Mouvement politique d’éducation populaire (M’Pep), le Forum social des quartiers populaires (FSQP) et le Parti communiste des ouvriers de France (PCOF) s’est soldée sur un net constat de désaccord. La question de la participation aux exécutifs régionaux oppose le NPA aux formations du Front de gauche (PCF, PG, GU), dont les trois conditions mises en avant pour participer à la gestion des régions – la possibilité de mettre en œuvre les points essentiels du programme, un rapport de force suffisant, l’exclusion du MoDem – conviennent à toutes les autres organisations.

« L’obstacle ne porte ni sur le bien-fondé de la présentation de listes autonomes, ni sur le cadre d’une campagne commune large, ni même sur le programme » , note Christian Picquet, porte-parole de la GU, pour qui il est « tout à la fois plus circonscrit… et plus grave » . L’essentiel de cette rencontre, qui a duré plus de trois heures trente au siège du Parti de gauche, en présence de Jean-Luc Mélenchon et d’Olivier Besancenot, a en effet porté sur une quatrième condition que le NPA voulait ajouter pour dire : « Cela ne sera pas possible dans le cadre d’exécutifs qui seraient dominés par le PS et/ou Europe Écologie [EE], qui mènent des politiques d’adaptation au libéralisme. » Ce que les participants à cette réunion n’ont pas manqué d’interpréter comme un refus de principe de participer à toute majorité de gestion avec le PS et les Verts.

Et si cette sixième réunion des formations de l’autre gauche s’est terminée sur la convocation de deux réunions concurrentes, l’une à l’initiative du NPA, l’autre à l’initiative du Front de gauche, personne ne ferme tout à fait la porte à personne. Au niveau national, la discussion a simplement cédé le pas à une bataille de communiqués, chaque partie présentant sa version de la réunion du 10 novembre. Sans que les positions soient totalement figées.
Dans les régions, des réunions unitaires se tiennent. En Bretagne, seule région où le PCF rêve d’un front de gauche élargi au PS, aux écologistes et aux indépendantistes dès le 1er tour, les formations de l’autre gauche, NPA compris, se sont ­rencontrées le 14 novembre et « ont décidé de poursuivre cette rencontre pour aller vers une liste commune ». En Languedoc-Roussillon, le NPA estime que la position de Marie-George Buffet, « ni au premier ni au second tour avec Georges Frêche » , permet de contourner l’obstacle de l’exécutif, et réclame une rencontre unitaire d’ici à la fin du mois.
Plus étonnant, le 10 novembre, au moment où le NPA s’arc-boutait sur son amendement, le NPA des Bouches-du-Rhône en présentait, à Marseille, une version différente à ses partenaires potentiels puisque le refus « de participer à un exécutif dominé par le PS ou EE » s’appliquerait dans le cas où celui-ci « mènerait une politique conforme aux exigences du patronat et de l’Union européenne avec les traités qui la régissent » . Toute la nuance est dans le conditionnel et la caractérisation de la politique.

Signe de la volonté toujours vive d’aboutir à un accord, un appel lancé samedi dernier, à l’initiative de la FASE, des Alternatifs et de responsables unitaires du NPA, membres ou non du courant Convergences et alternatives, a recueilli 2 500 ­signatures en moins de trois jours. Affirmant qu’un « échec serait injustifiable auprès du peuple de gauche » , il suggère d’examiner la question des exécutifs dans la « direction collective de campagne » après le 1er tour et demande d’ « avancer au plus tôt et de débattre des axes essentiels de l’alternative commune [à] proposer dans tous les quartiers et dans toutes les régions ».

Cette volonté unitaire se confirme avec le résultat des dernières conférences régionales du PCF, qui ont nettement confirmé l’engagement des communistes en faveur de listes du Front de gauche élargi au premier tour. Aucune grande région n’a fait un autre choix.

Dans ce contexte, le NPA a pu mesurer l’isolement où le conduirait sa position de principe s’il la maintenait. Au cours de la nouvelle réunion qu’il avait convoquée, lundi soir, les quatre organisations (FASE, Alternatifs, M’Pep, FSQP) qui avaient fait le déplacement ont expliqué qu’elles ne feraient pas une campagne séparée avec lui. Elles ont aussi regretté que le NPA, qui présente maintenant son amendement dans la version des Bouches-du-Rhône, n’ait pas présenté cette inflexion le 10 novembre. Enfin, elles l’ont invité à continuer de participer aux discussions unitaires dans l’attente de la décision de leurs militants, qui se prononceront sur le choix de leur parti début décembre.

Une réunion, ouverte à toutes les organisations, devait se tenir, le 18 novembre, au siège du PCF. La discussion étant close sur la stratégie, elle devait porter sur l’organisation de la campagne, les modalités de prises de décisions et les mesures phares.

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