Hulot, meilleur atout des écologistes ?

Il ne fait guère de doute que l’animateur va présenter sa candidature pour 2012. Pour cela, il devra affronter Eva Joly en septembre lors de la primaire d’investiture d’Europe Écologie-Les Verts (EELV).

Patrick Piro  • 31 mars 2011 abonné·es
Hulot, meilleur atout des écologistes ?
© Photo : AFP / Desmazes

Pour l’un, « tous les signaux indiquent qu’il ira »  ; un autre « ne voit vraiment pas ce qui pourrait l’empêcher de se déclarer » . Ses proches ne lui couperont pas l’herbe sous le pied, mais aucun ne doute que Nicolas Hulot va se lancer dans la course à la présidentielle. « Il fera part de sa décision dans la première quinzaine d’avril » , précise Jean-Paul Besset, l’un de ses plus proches conseillers politiques. Tout juste rentré de Colombie, où il tournait ce qui pourrait être son dernier documentaire « Ushuaïa » avant un moment, Nicolas Hulot règle d’ultimes questions personnelles et professionnelles. Il devra, entre autres, renoncer à sa fonction d’animateur sur TF 1, et la fondation qui porte son nom, tenue à l’apolitisme, deviendrait la Fondation pour la nature et l’homme.

En novembre 2006, Nicolas Hulot avait lancé son « pacte écologique ». Les principaux candidats à l’Élysée l’avaient signé, s’engageant à faire de l’impératif écologique le déterminant des politiques publiques. Alors au faîte de sa popularité, l’animateur avait finalement renoncé à se lancer dans la compétition, jugeant que sa place était dans l’action associative et non partisane. La suite, c’est un Grenelle de l’environnement très peu ambitieux, et des reculs décisifs, comme l’abandon de la taxe carbone. « Sarkozy l’a beaucoup déçu » , souligne un membre de la Fondation Nicolas-Hulot. « Il a admis qu’un “plafond de verre politique” empêchait une véritable prise en compte de l’écologie par les partis au pouvoir. C’est donc en cohérence avec ses convictions qu’il a décidé cette fois-ci d’envisager sa candidature » , commente Jean-Paul Besset.

Son principal atout sera sa popularité. Le baromètre Ifop de mars le met en tête des personnalités politiques testées, avec 76 % de bonnes opinions, devant le socialiste Dominique Strauss-Kahn. « Et puis le public, même s’il ne fait pas toujours la différence entre le médiatique et le politique, l’identifie sans hésitation comme un écologiste, ce qui n’est pas le cas de sa concurrente Eva Joly, connue pour sa carrière de juge » , souligne le député Yves Cochet. Lui-même candidat, il a annoncé de longue date qu’il se retirerait au profit de Nicolas Hulot s’il entrait en lice. Dont il est acquis qu’il se soumettra à la primaire d’investiture d’Europe Écologie-Les Verts.

Les sondages pourraient peser lourd dans la préférence finale des dirigeants d’EELV, qui soutiennent aujourd’hui majoritairement Eva Joly : les écologistes ont beaucoup de mal à se faire entendre lors des présidentielles, où leur meilleur résultat est à mettre au crédit de l’un des plus médiatiques d’entre eux, le député Noël Mamère (5,25 % en 2002) [^2].

La stratégie est semblable dans les deux camps : élargir l’audience des écologistes. « Hulot, par sa personnalité et son itinéraire, incarne le mieux la mutation écologiste que nous appelons de nos vœux pour la société , défend Jean-Paul Besset. Parce qu’il n’est pas né écologiste mais qu’il l’est devenu, il est en capacité d’agréger un public nouveau, notamment dans les milieux populaires. » Son inexpérience de ce type de joute est cependant une faiblesse. « C’est un sensible, il n’aime pas prendre des coups ni en donner… » , reconnaît Yves Cochet.
Mais c’est sans aucun doute sur son positionnement politique qu’il sera le plus attendu au sein d’EELV.

Ses détracteurs insistent sur le pedigree des gros financeurs de sa fondation – EDF, TF 1, L’Oréal – ainsi que sur ses liens avec des politiques de droite, notamment l’ex-ministre de l’Écologie Jean-Louis Borloo. Pourtant, il n’y aura pas d’ambiguïté à l’heure où il prendra la parole, martèlent les partisans d’Hulot, qui se félicitent, après la catastrophe de Fuku­shima, de sa prise de position en faveur d’une sortie du nucléaire, dont il faisait jusqu’alors un mal nécessaire pour lutter contre le dérèglement climatique. « Ses convictions sont les nôtres, conformes à notre programme , affirme Denis Baupin, adjoint EELV au maire de Paris. Et il est totalement exclu qu’il fasse alliance avec Sarkozy. Le seul accord envisagé pour le second tour, c’est avec la gauche, même si cela ne signifie pas un désistement automatique. De plus, il est important pour nous que l’investiture d’EELV se joue entre deux personnalités non issues du sérail politique. »

Privilégier un profil médiatique au nom de l’efficacité électorale : Patrick Farbiaz, secrétaire du groupe EELV Paris XXe, voit dans cette dépolitisation un risque destructeur pour l’écologie : « Je ne vois pas Nicolas Hulot défendre la régularisation des sans-papiers. Et quelle crédibilité aura-t-il sur les questions sociales ? Nous pourrions donner le sentiment de nous replier sur un pré carré environ-nementaliste. »

Le prochain conseil fédéral d’EELV (2 et 3 avril) définira les règles de la primaire écologiste, qui devrait se tenir en septembre. Une motion, qui semble faire consensus au sein de la direction du parti, donnerait la possibilité à tout citoyen de participer au choix du candidat par Internet et moyennant une simple adhésion à la charte EELV. Cette ouverture pourrait favoriser Nicolas Hulot, dont le « défi pour la planète » a recueilli l’assentiment de plus de 893 000 personnes d’un simple clic informatique.

[^2]: Cependant, Ipsos ne retient pas Eva Joly dans son baromètre de popularité, alors qu’elle apparaît (mais pas Hulot…) dans ses sondages sur les intentions de vote. Elle en recueillait entre 5 et 7 % le 14 mars, selon les hypothèses de candidature socialiste.

Politique
Temps de lecture : 5 minutes

Pour aller plus loin…