Les savoir-faire paysans : une solution d’avenir

L’agro-industrie doit céder la place à une agriculture respectueuse de la biodiversité et des populations.

Claude-Marie Vadrot  • 15 mars 2012 abonné·es

Après maintes réflexions et fort de ses nombreuses expériences, un ingénieur agronome, professeur en agriculture comparée et en développement agricole à l’AgroParistech, livre un pamphlet écrit avec des mots raisonnables qui en renforcent la portée. Pour expliquer, preuves et chiffres à l’appui, que « les politiques agricoles ne peuvent plus être confisquées par des experts et des lobbies » . Marc Dufumier présente son travail comme « l’aboutissement de la réflexion d’un agronome engagé dans des projets de développement pour mettre fin à la faim et à la malnutrition » .

Parce qu’au début de sa carrière, au cours d’un séjour à Madagascar, il a compris qu’il fallait faire fructifier les savoir-faire au lieu de les éradiquer au profit de normes agricoles standards.

Il rappelle que si un milliard d’êtres humains souffrent de la faim et reçoivent moins de 200 calories par jour, et si deux autres milliards sont handicapés par des carences induisant des maladies chroniques, les causes sont à chercher du côté de nos agricultures subventionnées et hautement mécanisées.

La démonstration est implacable. Tout comme celle qui explique pourquoi le Nord mange mal et trop tout en servant aux consommateurs un cocktail de pesticides. Rappelant qu’un quart des Américains et des Anglais sont en surpoids et un tiers obèses, il reconnaît que, certes, les gens du Nord vivent plus vieux, mais explique aussi que « le corps médical se demande si les courbes ne vont pas bientôt s’inverser » .

Marc Dufumier préconise que les pays du Sud réduisent leurs exportations au profit du développement des cultures vivrières. Il fait aussi l’éloge du nomadisme pastoral, qui préserve les ressources, et plaide pour les cultures sous couverts forestiers protecteurs. Une technique qu’il a lancée depuis des années dans le nord du Sénégal.

Son credo : au Nord comme au Sud, respecter la tradition, ce n’est pas être archaïque.

Il se refuse ainsi à stigmatiser les agriculteurs français, « qui ne font que ce que l’agro-industrie impose » , et s’en prend au « diktat des supermarchés et des agro-industriels qui organisent partout la fin des paysans » . Avant de dresser l’éloge de l’agriculture bio, qui peut nourrir toute la planète en 2050 : « Parce que le bio n’est pas destiné à rester une alimentation pour privilégiés, parce qu’il s’agit d’une opportunité pour le Nord et la voie la plus sûre pour que le Sud puisse mettre fin à la faim. » Il suggère d’ailleurs l’application d’un bonus-malus pour inciter au passage à des systèmes de production plus respectueux.

Un constat qui ouvre des perspectives d’espoir portées par une agriculture plus « paysanne ».

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