DVD « Strip-Tease » : La télé toute nue

Une causerie entre toubibs, attablés dans un restaurant chic, partagée entre souvenirs personnels, anecdotes tragicomiques, blagues salaces. Entre deux coquilles Saint-Jacques et foie de veau. Après le restaurant, c’est au tour d’un chirurgien de livrer sa recette des artichauts à la barigoule et des rognons sauce moutarde, rissolés aux oignons, tout en opérant une patiente du foie. Ailleurs, dans les bureaux d’une brigade des mineurs, une petite fille racontant les abus sexuels dont elle a été victime de la part de son grand-père, lui aussi présent à cette audition. Ailleurs encore, une querelle de voisinage, de petites crasses en merdeux vandalisme ; l’élection d’une miss bébé ; un jeune homme addict aux jeux vidéo, en bisbille avec ses parents ; Marcelle, de corvée de chiottes de bon matin, qui refuse de se faire appeler « Madame Pipi », soulignant que « l’argent n’a pas d’odeur » … Ou encore une incursion dans la piste aux étoiles, du côté du cirque Romanès (en 1997), de répétitions en spectacles, dans son quotidien ordinaire et l’intimité d’une caravane.

Tels sont quelques épisodes de « Strip-Tease ». Des bribes d’existence, des cartes postales, du fait divers. Avec une marque de fabrique qui répond à quelques apophtegmes des créateurs du magazine, Jean Libon et Marco Lamensch. Il convient de ne pas montrer des gens placés dans une situation exceptionnelle, mais de viser ce qu’il y a de plus banal. Dans cette banalité, il s’agit, pourquoi pas, de prendre le temps de filmer, quitte à flirter avec l’ennui. Le téléspectateur n’étant pas considéré « comme un imbécile », le parti pris est de donner des éléments de réflexion sans tirer de conclusion. Montrer des images sans imposer de lecture. Ni présentateur, ni commentaire, ni banc-titre. Cet aspect brut de décoffrage pourrait laisser penser qu’on se moque des gens filmés. À vrai dire, on est loin des magazines de prétendue investigation, entre voyeurisme et provocation vulgaire. Une autre manière de faire de la télévision. À mi-chemin entre le reportage et le documentaire, créé en 1985, « Strip-Tease » était d’abord réservé au petit écran belge (la RTBF), au rythme mensuel, en première partie de soirée. Une diffusion régulière qui a duré jusqu’en 2002, tandis que le magazine a traversé les frontières, pour être réalisé en France dès 1992. Ce coffret de 3 DVD, réunissant les volumes 16, 17 et 18, célèbre donc les 20 ans de cette aventure audiovisuelle. Soit 15 épisodes (comprenant notamment ceux diffusés l’été dernier) et près de six heures de bonne télévision.