« Marche des républicains », quand l’antiracisme aseptisé recrute des MJS aux Jeunes Pop

Erwan Manac'h  • 3 décembre 2013 abonné·es

Le mot d’ordre circule sur les réseaux sociaux depuis le 11 novembre : une manifestation antiraciste « apolitique », en réaction aux huées contre François Hollande, pour « provoquer un sursaut républicain » ! La date est fixée au dimanche 8 décembre, le lendemain de la manifestation commémorant les trente ans de la marche pour l’égalité.

Mais leurs initiateurs ont rapidement été identifiés comme des militants socialistes aux ambitions personnelles difficiles à cacher. Loreleï Mirot, initiatrice du mot d’ordre, est une jeune militante socialiste étudiante en « communication politique », stagiaire à l’Assemblée nationale auprès du député PS Yann Galut. Elle a été rejointe par Benjamin Rosmini, militant socialiste depuis 2007 et étudiant à Sciences Po Grenoble, indique Rue89 (voir aussi la photo de trois des organisateurs sur Libé.fr).

Comme pour éluder les accusations, les organisateurs annoncent ce lundi dans un communiqué avoir réuni « les principales organisations politiques de jeunesse ». À savoir, surtout, les jeunes centristes : Démocrates, Cap 21, le Rassemblement citoyen (de Corine Lepage), l’UDI, auxquels s’ajoutent donc le MJS ainsi que les jeunes radicaux de gauche et les jeunes écologistes. «  On a rapidement été rejoint par (…) Gaétan de l’UDI et Valentin de l’UMP   [inscrit aux «Jeunes Pop» toulousains] »,* se félicite même Loreleï Mirot dans une interview donnée jeudi à … Marie Claire.

Illustration - « Marche des républicains », quand l’antiracisme aseptisé recrute des MJS aux Jeunes Pop

C’est le triomphe de l’antiracisme « moral », qui laisse soigneusement de côté les causes politiques du racisme et les discours qui l’attisent. Dites plutôt « marche transpolitique » , corrigent les organisateurs également soucieux de ne pas faire de leur sauterie une « marche anti Front national » .

Mouvement spontané ?

Il y a 30 ans, d’autres jeunes militants socialistes montaient déjà leur mouvement antiraciste « apolitique ». SOS Racisme, non moins coupé de la base et tout aussi médiatique – les « réseaux sociaux » en moins – s’était alors créé directement à l’Élysée, comme l’a lui-même rappelé samedi Julien Dray, cofondateur de l’association dans une interview au Monde  :


« Après les manifestations sur l’école privée de juin 1984 une nouvelle discussion a lieu avec Jean-Louis Bianco (secrétaire général de l’Élysée), raconte Julien Dray dans l’interview en forme de réponse au réalisateur du film « la Marche »[^2]. C’est à cette occasion que nous rencontrons Jacques Pilhan (le * *conseiller* * en communication de Mitterrand, ndlr). Et là, comme toutes les aventures politiques, il y a une rencontre humaine, c’est un déclic. »

Comment s’étonner du manque de crédibilité dont souffre encore aujourd’hui l’antiracisme de « Touche pas à mon pote » ?

[^2]: Il dénonce une « réécriture de l’histoire ». Le film se termine sur une laconique, mais néanmoins violente accusation de récupération de SOS Racisme

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