Le Ravi, cuvée spéciale

Le Ravi est aujourd’hui en kiosque, avec un numéro spécial. Spécial parce que le titre est depuis fin novembre en redressement judiciaire, à travers sa société éditrice, la Tchatche, parce que cet opus consacre précisément une large part de ses pages à la situation du journal, dessinant ainsi en creux un portrait de la «presse pas pareille» , avec ses difficultés, ses espoirs, ses exigences. Son utilité publique aussi.

Lire > Le mensuel Le Ravi en dépôt de bilan

On lit encore, dans ce numéro 124 du Ravi, une enquête fiction, imaginant la région Paca sous la poigne du Front national fin 2015 (tout ce qu’il y a de plus plausible) ; le palmarès des maires cumulards, dans une région d’élus prompts à additionner les mandats et les fonctions (où l’on retrouve Christian Estrosi à la première place dans une liste où les 8 premiers sont UMP, devant deux élus PCF) ; les ambitions de Bernard Tapie, lorgnant maintenant sur une radio et une télévision locale ; ou encore un reportage sur le conseil d’administration du 7e secteur marseillais, dirigé par le FN Stéphane Ravier…

«Ceci n’est pas un numéro du Ravi, prévient l’édito en page 2. Ceci est LE numéro que nous aurions aimé ne pas publier. Parce qu’il y est question d’un mensuel «pas pareil» en cessation de paiement que la justice pourrait «liquider» *, s’il ne se* «redresse» pas très vite. Parce qu’il annonce, là, tout de suite, une «restructuration», un «plan social», bref, l’obligation de tailler dans les effectifs déjà tout sauf pléthorique. Parce qu’il témoigne des difficultés d’une certaine presse, celle qui n’est pas la propriété d’un Bernard Tapie, des marchands de soupe, de téléphones, du béton ou d’armement…»

Mais, poursuit encore cet édito, «ceci n’est pas un enterrement. Ceci est un pari, du genre impossible, que nous sommes déterminés à relever. Celui de ne pas baisser les bras alors que la résignation semble devenir un sport local: résignation face à l’extrême droite et la droite extrême qui veulent définir seules l’identité de notre région, résignation face aux baronnets ubuesques qui assoient leur trône sur la démocratie locale, résignation face au pouvoir de l’argent. Ceci est un appel. Pour que vive une presse libre, dédiée à l’enquête et à l’irrévérence» .

Un appel ponctuant le journal en page 24 : «Un journal libre ne se consomme pas, il se lit. On ne l’achète pas, on finance son indépendance.»

Le Ravi , n°124, décembre 2014, 24 p., 3,40 euros. Voir également le site du journal.