«L’assemblée du M6R est représentative de la richesse du mouvement»

ENTRETIEN. Le Mouvement pour la VIe République (M6R), initié par Jean-Luc Mélenchon, s’est doté le mois dernier d’une assemblée à l’issue d’un processus que nous explique Boris Bilia, l’un des coordinateurs du mouvement.

Nicolas Poitier  • 15 avril 2015
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«L’assemblée du M6R est représentative de la richesse du mouvement»

Le Mouvement pour la VIe République (M6R) a été initié par Jean-Luc Mélenchon en septembre dernier.

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Il s’est doté le 18 mars d’une assemblée constituée de 188 sièges, dont 30 réservés aux initiateurs du mouvement qui constituaient jusqu’ici le comité d’initiative, 50 tirés au sort parmi plus de 80 000 signataires et 108 élus par Internet sur des professions de foi (voir sa composition). Nous avons demandé à Boris Bilia, membre du comité d’initiative et du comité technique du M6R, de nous restituer le processus qui a conduit à la désignation de cette assemblée et de nous en expliquer le fonctionnement. Militant du Parti de gauche, il est au sein du M6R chargé de la coordination et de la synthèse des idées et a contribué à établir le cahier des charges du site, la « plateforme citoyenne » Nous le peuple ]].

Pourquoi ce mouvement se dote-t-il d’une assemblée?

Boris Bilia: Depuis le début, était prévue l’« auto-organisation » du mouvement. Se doter d’une assemblée est une première étape vers cette « auto-organisation ». Plusieurs idées ont été proposées. Le fait d’organiser un grand rassemblement par exemple, mais cela coûte trop cher. D’autres ont proposé l’élection d’une assemblée, d’autres encore qu’une partie soit tirée au sort. Une synthèse s’est dégagée au fil des débats sur la plateforme Internet et dans les comités, et nous avons décidé de faire un essai d’assemblée.

Vous parlez d’assemblée représentative sur votre site. Or, le mode de désignation de cette assemblée conduit à se poser la question de sa représentativité. Pour qu’elle soit représentative des idées, la logique aurait voulu qu’elle soit élue à la proportionnelle… Pour qu’elle le soit sociologiquement, il aurait fallu tirer au sort tous les membres et en interroger la structure sociale. De quoi cette assemblée est-elle représentative ?

De tout le monde, l’assemblée est représentative de la richesse du mouvement. Elle suit trois méthodes de désignation qui la rendent tout à fait légitime pour proposer ou animer le mouvement. Pour ce qui est du message politique, il est fixé par le texte d’appel à signatures qui veut une VIe République débarrassée de la monarchie présidentielle et donnant des droits sociaux, écologiques et humains. Ce n’est pas n’importe quelle VIe République !

Mais la représentativité parfaite n’existe pas, s’il y a par exemple 50 idées et qu’il y a 30 sièges, les 50 idées ne seront pas représentées. C’est une composition imparfaite forcément. Il y a eu beaucoup d’échanges. Sur les 30 sièges réservés aux initiateurs, beaucoup de personnes sont sceptiques sur le principe par exemple. Mais c’est aussi un moyen de dissoudre le comité d’initiative puisque ceux des fondateurs qui veulent vraiment participer à l’« auto-organisation» du mouvement sont à égalité avec les autres.

Certains initiateurs voulaient rester informés sans s’investir plus, d’autres ont voulu, au contraire, être actifs dans le mouvement. Parallèlement, les personnes qui ont lancé le mouvement se sentent une responsabilité morale et, en tant qu’intellectuels ou universitaires, ils connaissent souvent bien les sujets. La désignation des sièges réservés aux initiateurs s’est faite par volontariat. Ensuite, il y a des organisations politiques de « l’arc gauche large » qui ont désigné des représentants. « Le parti socialiste critique » , Europe écologie-Les Verts, Ensemble!, le PCF, Nouvelle Donne et le Parti de gauche ont leur place dans cette assemblée parce qu’ils portent aussi le mot d’ordre de la VIe République. Des sièges ont donc été réservés pour ces organisations parmi ces trente.

Quel est le rôle de l’assemblée ? Décider ? Transmettre ? Écouter ?

C’est aux signataires et aux membres de l’assemblée de proposer toutes les modalités pour la suite. Un formulaire a été envoyé à tous ses membres pour en définir les missions. Le rythme de ses réunions, s’il faut une charte, quelles propositions pour l’organisation du mouvement. Est ce qu’il faut des commissions fonctionnelles ? Comment s’organiser localement ? Ce questionnaire va être proposé de la même manière à tous les signataires.

Il faut attendre le retour des questionnaires, mais a priori le rôle de l’assemblée est de proposer des pistes à tous les signataires. La semaine dernière, pour le 9 avril, le comité technique a proposé une ébauche de tract participatif contre la loi Macron. Les signataires ont réagi en ligne en proposant des modifications, les gens ont voté sur les commentaires et une synthèse a été faite. L’assemblée peut par exemple proposer de continuer ce genre de méthode.

Il faut vraiment prendre le temps et construire la confiance vis-à-vis de tous les citoyens qui participent à ce mouvement et donc ne pas présager de ce qui va être décidé ou proposé.

Il faut écouter tous les signataires et en même temps les informer de ce qui est proposé. Le rôle de l’assemblée est de proposer, d’informer, de coordonner. Son rôle n’est pas de décider seule, mais l’objectif est de codécider avec les signataires.

Il serait bien que les débats soient filmés, enregistrés, retranscrits, Il y a des possibilités de forum internet de débats pour les signataires au moment ou l’assemblée se réunit. On pourrait poser des questions, faire des aller-retours dans tous les sens.

Comment peut-on contacter un membre de l’assemblée ? Et savoir qui contacter ?

Les résultats ont été diffusés par région, des groupes sur Facebook et sur la plateforme « Nous le peuple » ont été créés pour permettre une communication entre signataires et représentants.

On ne peut pas encore interpeller directement un représentant lorsqu’il a décidé de garder l’anonymat, mais on aimerait bien améliorer le processus.

Dans la pratique, la désignation de l’assemblée a été un grand succès. Le nombre de signataires a augmenté de 10 000 à 12 000 durant cette période. Avec une pointe quand le 49-3 a été utilisé à l’Assemblée nationale. Lors du vote en lui-même, 10 000 personnes ont voté sur une période de 10 jours. C’est un taux de mobilisation supérieur à celui de Podemos en Espagne.

Politique
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