Le festival « off » dans l’ombre du malin

Mounya Boudiaf évoque les femmes de Hassi Messaoud et Didier Bezace revisite Feydeau.

Gilles Costaz  • 16 juillet 2015 abonné·es
Le festival « off » dans l’ombre du malin
© Photo : *Quand le diable s’en mêle* , de Didier Bezace / Nathalie Hervieux

Haine des femmes laissées pour mortes

Présence Pasteur , 22 h 15, tél. : 04 32 74 18 54.

Ce texte de Nada Kaci, Mounya Boudiaf l’a adapté et mis en scène pour ne pas laisser l’oubli recouvrir un épisode terrible de l’histoire quotidienne algérienne. Une nuit de 2001, à Hassi Messaoud, emportés par leur fureur machiste, exaltés par un imam, plusieurs centaines d’hommes se ruent sur les femmes, les violentent, les blessent, fracturent les maisons, et repartent impunis. Un procès condamnera quelques meneurs, mais, dans ce genre d’événements, ce sont toujours les femmes qui passent pour coupables. La pièce suit le destin d’une femme mariée, répudiée, remariée, mère de plusieurs enfants, cherchant du travail, errant entre domiciles décents et bidonvilles. La comédienne est autant conteuse qu’actrice. Associant la flamme et la douceur, elle sait varier les émotions et suggérer ce que les mots ne disent pas. Son partenaire, Hammou Graïa, joue tous les autres rôles, masculins et féminins. Il le fait avec l’habileté secrète du grand acteur qu’il est. Déjà présenté au théâtre du Nord à Lille, puis à la Maison des métallos à Paris, ce spectacle a été créé pour vivre et témoigner longtemps. On lui souhaite de porter un peu partout sa force de vérité humaine et théâtrale.

Quand le diable s’en mêle

Fête nocturnes de Grignan (Drôme), tél. : 04 75 91 83 65, jusqu’au 22 août.

Les Fêtes nocturnes de Grignan propose chaque été à un metteur en scène de composer un spectacle dans la cour du château. Succédant à David Bobée, qui présentait une Lucrèce Borgia d’anthologie, Didier Bezace a pris le parti de relier trois pièces, Léonie est en avance, Feu la mère de madame, On purge bébé, de Feydeau. Sans toucher au texte, il fait entrer dans chaque histoire un diable qui incarne beaucoup la cupidité bourgeoise et un peu l’appétit sexuel. Celui-ci arrive à vélo dans le château Renaissance ! Le dispositif (un grand coffre qui a toutes les fonctions, lit, bureau, salon) est ingénieux, le rythme juste, les acteurs excellents et sans conventions : Clotilde Mollet, Lisa Schuster, Thierry Gibault, Ged Marlon, Philippe Bérodot, Océane Mozas, Luc Tremblais… On rit beaucoup. Mais pourquoi ces multiples clins d’œil au public dans l’interprétation du diable ? Bezace le raffiné a étrangement la main lourde.

Théâtre
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