Roms : Stigmatisation politique

Quand le cirque Romanès est vandalisé et Manuel Valls blanchi par la justice, ce sont les Roms qui trinquent.

Jean-Claude Renard  • 14 octobre 2015 abonné·es

Installé depuis fin juin square Parodi, près de la porte Maillot, dans le XVIe arrondissement parisien, avec l’autorisation de la Mairie de Paris, le cirque Romanès est victime depuis plusieurs semaines de dégradations diverses, vols et actes de vandalisme (fenêtres brisées, portes des caravanes fracturées, incendies criminels, fils électriques et conduites d’arrivée d’eau arrachés). Au moment de présenter un nouveau spectacle, son patron et fondateur, Alexandre Romanès, entend porter plainte contre X et a lancé un appel à soutien sur Mediapart afin que « cessent ces actes racistes ». Sa troupe d’une petite trentaine de personnes doit également faire face à deux associations de riverains (dont l’une a déposé un recours devant le tribunal administratif), opposées à leur implantation, estimant que leur chapiteau « contribue à la dégradation du site ». Pourtant, « il y a toujours eu des cirques sur cet espace, observe Alexandre Romanès ; ce qui gêne, c’est le mot tzigane » .

Au même moment, Manuel Valls était relaxé, le 8 octobre, par la justice. Le Premier ministre était poursuivi pour provocation à la discrimination raciale par l’association la Voix des Roms, après avoir déclaré, en 2013, que les « Roms ont vocation à revenir en Roumanie ou en Bulgarie ». Une première plainte, portée par le Mrap, avait été classée sans suite. On peut donc déclarer comme Manuel Valls, sans rien risquer pénalement, que « la proximité de ces campements provoque de la mendicité et aussi des vols, et donc de la délinquance », ainsi que le rappelle le sociologue Éric Fassin, dans une tribune parue dans le Monde (ce même 8 octobre). Ce que dénonce aujourd’hui Alexandre Romanès, bien au-delà de son cas, entre agressions et discriminations, c’est bien le lot quotidien des Roms, installés dans leurs camps de fortune, subissant ordinairement ce qu’on peut appeler une chasse à l’homme. Sans grand monde pour s’insurger, peu d’échos dans les médias. Comment s’étonner alors, selon une enquête de la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH), que le rejet de ces populations s’amplifie en même temps que la stigmatisation politique ? En 2013, relevait cette étude, « plus de 87 % de la population considère les Roms comme un groupe à part dans la société. »

Société
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