Un havre pour les lanceurs d’alerte

La Maison des lanceurs d’alerte (MLA) a été inaugurée le 9 novembre à Paris. Le but ? Les protéger.

Ingrid Merckx  • 13 novembre 2018 abonné·es
Un havre pour les lanceurs d’alerte
© photo : Ashley Feder/Getty Images/AFP

Les lanceurs d’alerte vont enfin avoir une maison. Une vingtaine d’ONG, dont Anticor, Transparency International France, la Fondation des sciences citoyennes, Attac, le Gisti, et le Syndicat national des journalistes travaillaient sur un projet d’association depuis plusieurs années. La Maison des lanceurs d’alerte (MLA) a été inaugurée le 9 novembre, une semaine avant l’ouverture, le 16 novembre, à Paris, de l’édition 2018 du Salon des lanceurs d’alerte.

À lire aussi >> L’ASN va lancer une plate-forme pour les lanceurs d’alerte du nucléaire

Le but ? Les protéger. Car, si la loi Sapin 2 prévoit un bouclier juridique aux lanceurs d’alerte, aucun statut global ne les protège en tant que tels. Ils restent exposés à du harcèlement, des agressions, des pressions, des procès, des licenciements, des impacts sur leur vie personnelle… « D’Irène Frachon à Edward Snowden en passant par Antoine Deltour, les lanceurs d’alerte prennent tous les risques pour défendre en conscience l’intérêt général », annonce le site de la MLA, dont la première assemblée générale se tiendra le 21 novembre.

Le propre des lanceurs d’alerte ? « Sentinelles, vigies […], ils nous préservent de systèmes qui sont brutaux, violents, d’un point de vue social, écologique ou sanitaire, résume Claire Nouvian, de l’association Bloom, qui œuvre contre les méthodes de pêches destructrices. La MLA a été créée pour les aider à faire face aux représailles, aussi judiciaires, et aux frais de justice. » Nicole Marie Meyer, de Transparency International France, a perdu son emploi au quai d’Orsay, connu la solitude, l’humiliation, les procès, et vu sa santé se dégrader, pour avoir signalé à sa hiérarchie des faits de corruption. « Aucune ONG n’a les moyens de défendre seule tous les lanceurs d’alerte dans tous les domaines. Syndicats et associations se sont regroupés […] pour les soutenir tout au long de leur traversée du désert jusqu’à ce qu’ils obtiennent justice. »

Cette maison voit le jour alors que la loi « secret des affaires » du 30 juillet vient d’être invoquée pour bloquer la parution d’informations sur le Levothyrox, médicament qui fait l’objet de plaintes pour effets secondaires invalidants. Basta ! et l’Observatoire des multinationales, en partenariat avec le collectif EurosForDocs, ont d’ailleurs lancé le 13 novembre les « Pharma Papers », un outil en ligne pour mettre en lumière la toile d’influence tissée par les laboratoires. Emmanuelle Amar, présidente du Remera, qui a révélé l’affaire des bébés sans bras dans l’Ain, a appris le 29 octobre que son licenciement était suspendu. Mais quel avenir pour sa structure, son équipe, et leurs recherches sur ces malformations ?

Société Économie
Temps de lecture : 2 minutes

Pour aller plus loin…

L’affaire Tran, exemple malheureux d’une justice à deux vitesses
Décryptage 25 novembre 2025

L’affaire Tran, exemple malheureux d’une justice à deux vitesses

112 plaignantes, 1 gynécologue… et 11 ans d’instruction. En 2027, le docteur Tran sera jugé pour de multiples viols et agressions sexuelles. Plaintes ignorées, victimes oubliées, délais rallongés… Cette affaire témoigne de toutes les lacunes de la justice en matière de lutte contre les violences sexistes et sexuelles.
Par Salomé Dionisi
« J’étais bloquée face à son pouvoir de médecin »
Entretien 25 novembre 2025 abonné·es

« J’étais bloquée face à son pouvoir de médecin »

Julia* fait partie des nombreuses patientes qui accusent le médecin gynécologue Phuoc-Vinh Tran de viols et d’agressions sexuelles. Treize ans après les faits, elle souhaite prendre la parole pour dénoncer les dégâts que causent les lenteurs de la justice.
Par Hugo Boursier
Elena Mistrello, autrice italienne de BD expulsée : « Ce contrôle des frontières concerne tout le monde, en premier lieu les migrants »
Entretien 25 novembre 2025

Elena Mistrello, autrice italienne de BD expulsée : « Ce contrôle des frontières concerne tout le monde, en premier lieu les migrants »

Après son expulsion forcée en Italie, Elena Mistrello, autrice de BD italienne dénonce dans Politis les moyens de contrôle, de surveillance et de répression déployés par l’État contre les personnes migrantes et les militants.
Par Pauline Migevant
« Nous, victimes du docteur Tran, perdues dans les limbes de la justice »
Justice 25 novembre 2025

« Nous, victimes du docteur Tran, perdues dans les limbes de la justice »

Au terme d’une dizaine d’années d’enquête, le docteur Tran comparaîtra devant la cour criminelle du Val-d’Oise en 2027 pour 112 viols et agressions sexuelles. Dans une tribune, quarante plaignantes alertent sur les délais de la justice.
Par Collectif