Un an de chaos

Portrait intime d’une ville palestinienne, Rafah, saisie à vif, de 2005 à 2006. Désarroi quotidien.

Jean-Claude Renard  • 31 mai 2007 abonné·es

Deux dates encadrent ce reportage signé Stéphane Marchetti et Alexis Monchovet : 12 septembre 2005 et 12 septembre 2006. Soit une année pleine passée dans une petite bourgade. À Rafah, située tout au sud de la bande de Gaza. Une ville coupée en deux par la route Philadelphie, édifiée en 1982, corridor de sécurité marquant la frontière entre l’Égypte et la bande de Gaza.

En septembre 2005 donc, l’armée israélienne se retire de toutes ses positions de la bande de Gaza. Évacuation de la route et fin des colonies. L’accès à la mer est enfin autorisé. Une nouvelle ère peut commencer. Avec un enjeu délicat~: pour éviter le retour des Israéliens, les frontaliers se doivent de contrôler «~sévèrement~» les trafiquants et les creuseurs de tunnels qui font passer des armes aux groupes du Fatha, du Hamas et du Jihad islamique. À vrai dire, les lieux restent calés dans le chaos (pour ne pas dire dans le bordel). Le désengagement israélien a plongé la ville dans la crise économique et sociale poussant les familles à s’armer pour leur sécurité. C’est précisément un an de chaos qui est filmé ici. C’est aussi, caméra à l’épaule, l’âpreté d’un quotidien.

Après la victoire du Hamas aux élections législatives, la ville sombre un peu plus. Le 25 juin 2006, un caporal israélien est kidnappé, justement depuis un tunnel creusé à partir de Rafah. En représailles, Tsahal bombarde les maisons des trafiquants d’armes situés le long de cette fameuse route Philadelphie. Désarroi d’abord. Le 12 septembre 2006 (dernier jour dans l’agenda du reportage), douze mois après le désengagement, tous les espoirs de renouveau se sont envolés. Tout se passe comme si la ville ne pouvait sommeiller «~dans la normalité~». Non, la normalité, le quotidien, c’est une population civile victime, étranglée, toujours, encore. Ou une fois de plus. Quarante ans après la guerre des Six-Jours, ce reportage sonne comme une métaphore du conflit.

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