Le putsch se mue en guerre civile

Ivan du Roy  • 3 mars 2011 abonné·es

La situation se dégrade très vite en Côte d’Ivoire. D’un côté, l’ONU dénonce des « actes d’hostilité directe » contre ses représentants. De l’autre, les partisans de Laurent Gbagbo évoquent un « complot » et appellent à l’autodéfense. Depuis le 21 février, des combats à l’arme légère et au lance-roquettes ont lieu dans la banlieue d’Abidjan, et une équipe d’inspection onusienne a essuyé des tirs le 28 février sur l’aéroport de Yamoussoukro. Venue vérifier des informations sur une livraison d’armes et d’hélicoptères, en violation de l’embargo, la mission internationale en a été empêchée par des miliciens fidèles à Gbagbo. Des vols suspects entre la Biélorussie et la Côte d’Ivoire ont été observés depuis mi-février. Des soupçons de trafic d’armes immédiatement démentis par les autorités biélorusses. L’ONU compte 8 000 soldats de la paix en Côte d’Ivoire, principalement d’un contingent du Bangladesh.

À l’ouest du pays, plusieurs bourgades proches de la frontière avec le Liberia ont été prises par les ex-rebelles des Forces nouvelles, qui soutiennent le président Alassane Ouattara, obligeant les Forces de défense et de ­sécurité, contrôlées par le gouvernement Gbagbo, à se replier. Alors que la télévision publique n’émettait plus, les antennes ayant été touchées par des tirs, le gouvernement Gbagbo suspendait la parution de plusieurs journaux, dont quatre quotidiens jugés proches de l’opposition. Depuis la proclamation de la victoire d’Alassane Ouattara, le 1er décembre 2010, validée par les observateurs onusiens, et le putsch électoral de Laurent Gbagbo, le pays n’a jamais été aussi près de sombrer à nouveau dans la guerre civile. 45 000 Ivoiriens ont déjà fui au Liberia. La mission onusienne arrivera-t-elle à empêcher l’engrenage ? Dans le cas contraire, quelle sera l’attitude de la France, qui compte encore 900 militaires sur place ? Les militaires français, qui s’étaient interposés entre les rebelles nordistes et les troupes gouvernementales pendant la guerre civile, se font pour l’instant discrets. Enfin, si la situation demeure bloquée, assistera-t-on à une partition de fait du pays entre Nord et Sud, sur la ligne de front qui était celle de 2002 ? Avec le risque que chaque camp décrète, dans sa zone respective, la chasse à l’ennemi intérieur.

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