À flux détendu

Christophe Kantcheff  • 9 février 2012
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Une série malheureuse s’abat actuellement sur les affiches. Après celles du prochain spectacle de Stéphane Guillon empêchées par la régie publicitaire de la RATP (voir Politis la semaine dernière), c’est au tour des affiches de deux films d’être dans le collimateur. Le premier, les Infidèles, un film à sketches (sortie le 29 février) avec Jean Dujardin et Gilles Lellouche, a vu ses deux affiches retirées à la demande de l’Autorité de régulation professionnelle de la publicité (ARPP). On voit sur l’une Jean Dujardin disant « Je rentre en réunion » et tenant les deux jambes dénudées d’une femme, la tête en bas ; sur l’autre, Gilles Lellouche s’exclamant au téléphone « ça va couper, je rentre dans un tunnel » tandis qu’une femme se tient de dos devant lui, sa chevelure au niveau de sa braguette. L’ARPP estime que ces affiches « sont clairement de nature […] à choquer une partie du public… puisqu’elles propagent une image de la femme portant atteinte à sa dignité et à la décence » .

Le second film, américain, s’intitule Underworld : nouvelle ère, en salle cette semaine. Sur l’affiche réservée aux flancs de bus, l’actrice Kate Beckinsale pointe ses armes en direction des passants. La Régie des transports marseillais a refusé de l’apposer sur les bus de la ville, prétextant l’état « de la violence régnant à Marseille » . L’argument est spécieux, et cette censure ne se justifie guère. Reste que l’affiche, assez primaire, comme souvent dans le cas de films violents, pollue les regards.

Surtout, en s’attaquant à l’affiche, on ne dénonce pas ce qui doit l’être vraiment. Ces grosses machines de divertissement bénéficient généralement de sorties surdimensionnées, avec plusieurs centaines de copies, occupant les écrans aux dépens de films plus fragiles. Là opère un phénomène insidieux et beaucoup plus efficace : la censure économique. C’est cette censure-là qu’il faudrait censurer.

Culture
Temps de lecture : 2 minutes
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