À flux détendu

Christophe Kantcheff  • 7 février 2013
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La liberté n’est pas chose facile à trouver. Il y a des moments, pourtant, où j’ai la sensation de m’en approcher. Par exemple, quand je rencontre une langue non lestée au sens commun. Attention, je ne désigne pas là une suite de mots employés avec imprécision, dont les significations dès lors seraient confuses. Je parle de ce que j’aime le plus dans la poésie : ce qui fait décoller des sens imposés pour en découvrir d’autres. La grande poétesse américaine Rosmarie Waldrop le dit autrement : « Poésie : une logique différente, moins linéaire. »

Pour preuve, le recueil qui paraît aujourd’hui aux éditions de l’Attente (86 p., 11,50 euros, www.editionsdelattente.com), intitulé la Revanche de la pelouse, et traduit de l’américain par Marie Borel et Françoise Valéry. Exemple : « Le bien-être contient l’éventualité de la douleur : ainsi un jeune garçon peut-il faire preuve de la docilité attribuée aux filles et un excès de sperme s’approcher parfois de la spiritualité ». Ou encore, très différent : « Au commencement il y eut des pluies torrentielles et le monde se sépara en flaques. Nous étions pourtant déjà dans l’ère du nucléaire et de ses méthodes expéditives. Des précipitations ininterrompues trempèrent le point sec du présent jusqu’à ce qu’une fuite colorée atteigne la racine de nos cheveux ».

Il serait bien imprudent d’esquisser ici les thématiques abordées par Rosmarie Waldrop. On discerne tout de même qu’y revient la question de sa propre présence dans l’espace, du volume qu’on y occupe, du plein ou du vide existant entre l’autre et soi. Avec une importance du corps, en particulier celui de la femme, de la physique et du mouvement. « Pour Newton la pomme a la drôle d’habitude de tomber. D’un autre point de vue, Newton est projeté vers la pomme au repos », écrit-elle. La liberté, toujours, est affaire de regard.

Culture
Temps de lecture : 2 minutes
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