Enfermement des étrangers, loin des promesses de François Hollande

Loin de «l’exception» que souhaitait François Hollande en 2012, l’enfermement des étrangers reste «un instrument banal de procédure» , selon le rapport de cinq associations.

Lena Bjurström  • 18 novembre 2014 abonné·es
Enfermement des étrangers, loin des promesses de François Hollande
© Photo : JOEL SAGET / AFP

Plus de 45 000 étrangers ont été privés de liberté en 2013 , dont 3607 enfants. Les cinq associations présentes dans les centres et locaux de rétention[^2] ont rendu, le 18 novembre, un rapport toujours plus sombre sur ces lieux d’enfermement.

Près de la moitié des personnes placées en rétention en 2013 ont été expulsées. Pour 55% d’entre elles, cet éloignement forcé s’est déroulé sans aucun contrôle des juges, une proportion qui atteint 99% en Outre-mer où les droits des étrangers sont toujours plus bafoués.

«Pourtant, notent les associations, lorsqu’elles ont la possibilité de défendre leurs droits, 27% des personnes enfermées sont libérées par un juge, un chiffre qui démontre l’illégalité d’une grande partie des procédures.»

L’autre moitié des placements en rétention aboutissent à une libération. Une bonne nouvelle ? Selon le rapport, ce chiffre souligne surtout l’importance de mesures d’enfermement «abusives» . Plus de la moitié de ces libérations viennent en effet d’une décision judiciaire sanctionnant une violation des droits des personnes. L’autre moitié des étrangers libérés le sont, faute de pouvoir être éloignés par l’administration.

De manière générale, «le recours à la rétention administrative n’est pas devenu “l’exception” [que souhaitait François Hollande en 2012 ] *: il reste un instrument banal de procédure»* , affirment les associations.

Lire > Témoignages au Centre de rétention de Rennes

Un constat d’autant plus pessimiste que rien, dans le projet de loi relatif aux droits des étrangers qui devrait être examiné dans les prochains mois à l’assemblée, ne tend à modifier cette situation.

Ni la durée de rétention de 45 jours, ni le délai imposé de cinq jours avant le contrôle d’un juge des libertés et de la détention ne sont remis en question. Ces deux mesures faisaient pourtant partie des dispositions phares de la loi Besson de 2011, fortement critiquée par le Parti Socialiste, à l’époque dans l’opposition.

Au-delà, les associations dénoncent un projet de loi qui renforce «une politique d’éloignement basée sur un système d’enfermement à grande échelle et menée au détriment des droits» :

«Non seulement ce projet de loi ne réforme pas le dispositif actuel, mais il va au-delà, restreignant, par exemple, pour une partie des personnes étrangères visées, le délai de contestation de la mesure d’éloignement devant un magistrat.»

Pour en savoir plus sur le projet de loi :
Lire > Immigration : «la surveillance et le contrôle sont omniprésents»

Force est de constater que les propositions de ces cinq associations, pourtant auditionnées lors des concertations organisées en 2013, n’ont pas été jugées pertinentes par le ministère de l’Intérieur.

[^2]: La Cimade, l’Ordre de Malte France, Forum réfugiés Cosi, France Terre d’Asile, l’Association service familial migrants (ASSFAM)

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