Législatives italiennes : Un vote contre l’establishment

Le scrutin en Italie a été marqué par le succès de la Ligue et la déroute de la gauche.

Olivier Doubre  • 6 mars 2018
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Législatives italiennes : Un vote contre l’establishment
© photo : Michele Spatari / NurPhoto

Beaucoup d’images ont marqué la fin de ce scrutin législatif en Italie. La plupart des ministres démocrates du gouvernement Gentiloni ne parvenant pas à être réélus ; Matteo Renzi, bien qu’élu chez lui à Florence, obligé à la démission d’un Parti démocrate (PD) qui connaît une défaite sans précédent ; le bastion jadis « rouge » et imprenable de l’Émilie-Romagne passant à droite ; l’ancien Premier ministre Massimo D’Alema (du Mouvement démocrate et progressiste, issu d’une scission du PD) battu dans son fief des Pouilles… Mais l’image qui choque le plus est l’arrivée en tête de la Ligue, xénophobe, vulgaire et autoritaire (alliée au FN français en Europe), à Macerata, chef-lieu de la région des Marches, autrefois de gauche. C’est en effet dans cette ville qu’un de ses militants, ancien candidat aux municipales, avait tiré début février sur six Africains immigrés. Et le leader de la Ligue, Matteo Salvini, déclara même que « le problème n’[était] pas le tireur, mais la présence des migrants qui envahissent l’Italie »

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Au soir de ces élections, la gauche est en complète déroute, le PD réalisant, avec à peine 19 % des voix, le plus bas score de son histoire, la gauche de gauche de Libres et égaux, née d’une scission du PD, franchissant avec peine les 3 % nécessaires pour avoir quelques élus au scrutin proportionnel. Quant à Pouvoir au peuple, alliance de mouvements citoyens locaux et des communistes orthodoxes (qui avait reçu le soutien de Jean-Luc Mélenchon), elle n’obtient aucun siège avec un score décevant de 1,1 %. Ainsi, l’un des grands vainqueurs est la coalition de droite dure (avec plus de 37 % des voix), emmenée par le parti de Silvio Berlusconi et la Ligue de Salvini, celle-ci arrivant en tête, pouvant ainsi briguer le poste de Premier ministre si le président de la République les y appelle. L’autre vainqueur, premier parti de la péninsule aujourd’hui, est le mouvement (antisystème) Cinq Étoiles (M5S), assez inclassable sur l’axe droite-gauche puisqu’il mêle revendications écologistes, anti-corruption, anti-élites mais aussi anti-immigrés, qui arrive en tête seul avec plus de 32% des voix (1). Son leader, Luigi Di Maio, 31 ans, cherche aujourd’hui à constituer une coalition afin de gouverner, se tournant aux dernières nouvelles vers le PD, malgré l’opposition farouche de Matteo Renzi. Mais sa démarche pourrait aboutir. Il reste que ce scrutin a été celui du triomphe des forces contestant cinq années de pouvoir des démocrates qui, sans véritable adhésion populaire, ont multiplié les reniements : la droite au nord et le M5S au sud.

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Monde
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