Présidence Potemkine

Les mensonges macronistes deviennent si grossiers qu’ils ne passent plus. Où qu’on se tourne, le régime jupitérien est désormais contredit par une réalité qu’il ne contrôle plus.

Sébastien Fontenelle  • 8 mars 2023
Partager :
Présidence Potemkine
Manifestation contre la réforme des retraites à Paris, le 7 février 2023.
© Lily Chavance.

Emmanuel Macron ment. Les ministres dont il s’est entouré mentent. Effrontément.

Ça fait bientôt six ans qu’on le répète ici mais, cette fois, c’est un peu différent. Cette fois, leurs mensonges deviennent si grossiers, et leurs tripotages de la réalité si voyants, qu’ils ne passent plus : pour un peu – pour très peu –, on pronostiquerait, sans savoir encore (et cela peut inquiéter) la forme qu’elle prendra, la débâcle prochaine d’un régime qui n’a jusqu’ici perduré que par ses faussetés et sa brutalité face aux mobilisations. Car, où qu’on se tourne, on le voit désormais contredit par une réalité qu’il ne contrôle plus.

Ici, l’extravagantissime Olivier Dussopt, ministre du Travail englué dans ses menteries à répétition, lâche dans Le Parisien, et dans un ultime surcroît d’orwellisme halluciné, que l’abjecte réforme macroniste des retraites qui pénalisera principalement les femmes et les pauvres, et contre laquelle nous nous mobilisons par millions, est « une réforme de gauche, qui aurait pu être portée par un gouvernement social-démocrate » – confirmant donc, très involontairement, que l’autorité où il émarge est, comme nous le savons depuis 2017, de droite : cela fait un accablant requiem pour la fable du « en même temps ».

Ici encore, ce même gouvernement, qui ne sait plus comment contenir l’énorme rage qu’il voit monter dans le pays, programme in extremis (et après avoir tergiversé pendant deux ans), pour le 8 mars, Journée internationale des droits des femmes, et pendant que Macron (nous y reviendrons) écrase (aussi) l’Afrique de son mépris, un « hommage national » à l’avocate anticolonialiste et féministe Gisèle Halimi. Mais cela non plus ne prend plus, et son fils Serge Halimi, parmi d’autres, fustige cette mystification, en rappelant que « la meilleure façon d’honorer » la « mémoire » et les « combats » de sa mère est de rallier la rue, quand elle gronde contre ce pouvoir.

Les mensonges macronistes deviennent si grossiers qu’ils ne passent plus.

Ailleurs, Emmanuel Macron vend sa tournée de quatre capitales africaines comme un progrès nouveau dans le renversement de la Françafrique, mais, succombant à son naturel – qui est celui d’un respectueux dépositaire du legs colonial –, accable ses hôtes (1) d’un mépris insultant qu’onques n’avions vu depuis Tintin au Congo.

1

Éventuellement peu recommandables…

Après quoi, rentrant de cette ahurissante excursion, il tweete qu’« il ne peut y avoir deux poids deux mesures entre la tragédie qui se joue en Ukraine sur le territoire européen et celle qui se joue sur le sol africain » – escomptant probablement que nous ne verrons pas qu’en même temps qu’il se drape dans sa toge mitée de protecteur des peuples du monde, il vend des armes aux fidèles clients que sont les bourreaux du Yémen, entre deux hommages élyséens à ceux des musulman·es indien·nes et des Palestinien·es (2).

2

Liste non exhaustive.

De toute part, donc, le décor du macronisme tombe en pièces, et ce misérable règne apparaît enfin, et tout crûment, pour ce qu’il a toujours été : une présidence Potemkine.

Recevez Politis chez vous chaque semaine !
Abonnez-vous
Publié dans
De bonne humeur

Sébastien Fontenelle est un garçon plein d’entrain, adepte de la nuance et du compromis. Enfin ça, c’est les jours pairs.

Temps de lecture : 3 minutes
Soutenez Politis, faites un don.

Chaque jour, Politis donne une voix à celles et ceux qui ne l’ont pas, pour favoriser des prises de conscience politiques et le débat d’idées, par ses enquêtes, reportages et analyses. Parce que chez Politis, on pense que l’émancipation de chacun·e et la vitalité de notre démocratie dépendent (aussi) d’une information libre et indépendante.

Faire Un Don