À Paris, Révolution permanente déclare la « guerre à la guerre »

Le parti d’extrême-gauche a rassemblé plus de 2000 personnes lors d’un meeting, dimanche 25 mai, à Paris. Des militants du monde entier ont rappelé la nécessité de l’internationalisme face aux guerres, à l’impérialisme et à l’extrême-droite.

Pierre Jequier-Zalc  • 28 mai 2025 abonné·es
À Paris, Révolution permanente déclare la « guerre à la guerre »
Meeting Révolution permanente, dimanche 25 mai 2025.
© Pierre Jequier-Zalc

« C’est vertigineux. » L’espace Charenton, dans le douzième arrondissement parisien, vient à peine de se vider et Paul Morao, membre de la direction de Révolution permanente (RP), a encore du mal à croire que la jeune organisation révolutionnaire a fait salle comble – 1 600 personnes – et a même dû ouvrir une seconde salle de projection, également pleine à craquer.

En tout, ce sont donc plus de 2 000 personnes qui ont assisté au meeting de RP, dimanche 25 mai. Soit plus du double que l’année dernière : une expansion notable à l’extrême gauche où rares sont les organisations à connaître une popularité ascendante.

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Pour ce grand événement, RP a décidé de mettre l’accent sur l’internationalisme. « Dans un contexte où on ne parle que de nationalisme, de patriotisme, de chasse aux migrants, il n’y a pas de tâche plus importante que de montrer le drapeau de l’internationalisme », explique, en préambule, Daniella Cobet, membre de la direction de RP, rapidement reprise par l’ensemble d’une salle chauffée à blanc : « Non au militarisme, anti-impérialiste, internationaliste et guerre à la guerre ! ».

Contre « l’impérialisme décomplexé »

Concrètement, qu’est-ce que cela veut dire ? Au sein de Révolution permanente, on refuse tous les discours bellicistes et patriotiques qui fleurissent ces derniers mois. Et on prône l’organisation au niveau international, entre les travailleurs et travailleuses de tous les pays, pour contrer « l’impérialisme décomplexé » et l’extrême droite. La jeune organisation fait ainsi partie de la Fraction trotskiste (FT) qui rassemble des organisations révolutionnaires partout sur le globe.

Donald Trump représente le pire du capitalisme, associé à une politique migratoire terrible.

J. Wallace

À la tribune, des militants et militantes espagnols, américains, allemands, ou encore argentins, se succèdent. Comme Julia Wallace, militante et syndicaliste américaine au sein de Left Voice, une organisation d’une dizaine d’années. Ou, accueillie en rock star, Myriam Bregman, avocate argentine qui a affronté Javier Milei, président argentin d’extrême droite, lors des dernières élections présidentielles.

Toutes les deux font face à l’extrême droite dans leur pays et expliquent la nécessité d’avoir un paradigme internationaliste pour y faire face. « Donald Trump représente le pire du capitalisme, associé à une politique migratoire terrible. Il faut rappeler que la lutte des travailleurs et des travailleuses n’a pas de frontières. Personne n’est illégal », assène Julia Wallace.

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Forcément, au vu d’un contexte géopolitique marqué par la guerre en Ukraine et le génocide en cours à Gaza, chaque intervention comporte des fortes prises de position sur ces sujets. « Ce génocide a des complices partout dans le monde. On n’oubliera jamais les complices de ce massacre », lance Elsa Marcel, avocate et militante au sein de RP.

(Photo : Pierre Jequier-Zalc.)

« La réponse à la guerre en Ukraine ne peut être qu’internationaliste », embraie Sasha Yaropolskaya, exilée russe et militante à Du Pain & des Roses, l’organisation féministe de Révolution permanente. « Rejeter la guerre est un obstacle aux puissances impérialistes », termine Anasse Kazib, porte-parole de RP pour qui, au vu des appels à la militarisation, « si on n’est pas internationaliste aujourd’hui, on sera nationaliste, de gré, ou de force ».

Oui, on est marxiste, oui on parle de classe ouvrière, oui, on parle de grève générale.

S. Yaropolskaya

« Nous ne réformerons pas notre exploitation »

Aussi, la jeune organisation – créée en décembre 2022 – n’a pas épargné la gauche institutionnelle, que ce soit les Démocrates aux États-Unis, Die Linke en Allemagne, ou les partis du NFP en France, qui ont régulièrement été ciblés. « Nous ne réformerons pas notre exploitation », résume Julia Wallace avant que Sasha Yaropolskaya embraie : « Contrairement à eux, on assume : oui, on est marxiste, oui on parle de classe ouvrière, oui, on parle de grève générale. Nous ne sommes pas une gauche qui se couche devant l’extrême droite et ses thématiques ».

Enfin, ce meeting a aussi permis de rappeler un enjeu majeur pour la jeune organisation. Ce 18 juin, Anasse Kazib passera en procès pour « apologie du terrorisme » après avoir qualifié Israël « d’État sanguinaire » le 7 octobre 2023. « On veut faire de ce procès le procès de la criminalisation du soutien à la Palestine », assume Anasse Kazib.

Anasse Kazib, porte-parole de Révolution permanente. (Photo : Pierre Jequier-Zalc.)

Le porte-parole de RP avait tenté de se présenter à la présidentielle de 2022, mais avait échoué à recueillir les 500 parrainages nécessaires. Pour 2027, RP souhaite profiter de son expansion pour réussir, cette fois, à atteindre la barre, ce qui lui permettrait d’avoir une tribune médiatique plus importante, alors que Politis était le seul média présent ce dimanche. Porteront-ils, de nouveau, la candidature du cheminot, syndicaliste à SUD Rail ? Cela dépendra du verdict de ce procès où il risque potentiellement l’inéligibilité.

Mais l’essentiel n’est pas là. Après ce meeting aux airs de succès, l’organisation révolutionnaire compte bien continuer de se développer, notamment auprès de la jeunesse pour porter une voix radicale et internationaliste qui détonne dans le paysage médiatico-politique actuel.

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