Les gros esprits se rencontrent

Sébastien Fontenelle  • 12 février 2009 abonnés

Une fois par semaine, le vendredi, le Figaro de Serge Dassault publie, dans ses pages de fin, et sous la forme d’un bloc-notes, la prédication d’un réactionnaire auprès de qui (feu) Ronnie Reagan prend rétrospectivement des airs de collectiviste mou : Ivan Rioufol – also known as Иван Грозный [^2]. Dans sa dernière livraison, il relève, ravi, qu’ « en Grande-Bretagne, des ouvriers réclament la préférence nationale et rappellent la promesse du Premier ministre travailliste de donner “emplois britanniques pour travailleurs britanniques” » . Est-ce qu’on ne dirait pas un peu un antique flyer du Front national ? Ah ben si, tiens : on dirait. Et pour cause : la « préférence nationale » est comme chacun(e) sait l’une des plus vieilles lubies du Pen. Lancé, Rioufol se débonde.

Certes, juge-t-il, la droite régimaire qui étend sur nos vies son emprise a ceci de fort plaisant qu’elle est emmenée par un homme (dont le prénom est Nicolas et le nom Sarkozy) qui est aujourd’hui « seul porteur de la modernité » . (Vous ai-je bien flatté, Monseigneur ?)
Mais pour ce qui serait de la perséc… De la gestion des populations venues d’(un) ailleurs (menaçant) ? Ce gouvernement se montre d’une pusillanimité qui ne peut qu’affliger l’authentique patriote sergedassaultique.

Ainsi, hurle Rioufol : « Éric Besson, ministre de l’Immigration, reprend la litanie des bons sentiments en se félicitant de “l’immigration qui a enrichi la France” et du succès de la diversité. » (Éric Besson, c’est bien connu, ploie sous le joug d’une bien-pensance qui a déjà fait beaucoup de mal à l’Occident chrétien.) Contre cet avachissement de nos défenses nationales « à l’heure où le chômage augmente, où le pays s’appauvrit, où les tensions identitaires s’exacerbent »  [^3], Ivan the Terrible, tout proche de son point de fusion, préconise « de poser de vraies limites aux immigrations de travail et de peuplement » . (Car il y a déjà teeeeellement d’étrangers dans nos rues, mâme Dupont : ne croirait-on pas Tombouctou ?)

Deux jours après la publication de cette vigoureuse exhortation à bouter le Sarrasin (mais pas que), le 8 février donc, Le Pen à son tour glapissait que « l’immigration de masse tend à prendre l’allure d’une véritable colonisation » . Les deux hommes, par conséquent, disent peu ou prou la même chose, chacun avec ses mots, l’un dans le Figaro, l’autre sur ses tréteaux : décidément les gros esprits font rien qu’à se rencontrer.

[^2]: Ivan le Terrible

[^3]: L’immigré, on l’aura compris, non content qu’il nous pique nos meilleures sinécures, vient jusque dans nos cuisines manger notre soupe au pistou.

Publié dans
De bonne humeur

Sébastien Fontenelle est un garçon plein d’entrain, adepte de la nuance et du compromis. Enfin ça, c’est les jours pairs.

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