Ça va bien mais on ferme

Le plan social voulu par la direction de Philips n’obéit qu’à des impératifs de rentabilité immédiate.

Thierry Brun  • 21 janvier 2010 abonné·es

Philips serait au plus mal dans le secteur de l’électronique grand public, en particulier celui des téléviseurs à écran plat, au point qu’il est nécessaire de fermer l’usine de Dreux. C’est l’argument avancé début janvier par Joël Karecki, président de Philips France, et Richard Woods, directeur du dernier site industriel, lors d’un comité central extraordinaire qui s’est tenu au siège flambant neuf de Suresnes (Hauts-de-Seine). Les dirigeants invoquent la baisse de la demande de téléviseurs sur le marché européen, qui a entraîné une surcapacité de production. De plus, la branche télévision de Philips perd des parts de marché, reléguant le leader des ventes de téléviseurs en Europe au troisième rang en 2008. Enfin, le site de production à Dreux est déficitaire en dépit d’une restructuration menée en 2008, supprimant près de 280 postes.

Cette présentation catastrophiste n’a pas convaincu la direction départementale du travail d’Eure-et-Loir, ni les experts comptables du cabinet Syncea, mandaté par le comité central d’entreprise. Ces derniers ont remis en novembre 2009 un rapport qui a permis aux syndicats de démontrer l’absence de justification économique du plan social que la direction veut mettre en place. En vérité, la division « produits grand public » de Philips a dégagé d’importants bénéfices en 2009, notamment liés à la reprise économique. Au plus fort de la crise en 2008, l’ensemble du groupe est resté bénéficiaire (317 millions d’euros). Et 2009 n’a pas été une mauvaise année puisqu’il a engrangé des bénéfices (176 millions d’euros pour le seul troisième trimestre). Alors, pourquoi fermer Dreux ? En juillet 2009, le PDG de Philips, Gérard Kleisterlee, a livré le véritable objectif des restructurations : « Nous attendons […] une meilleure performance au second semestre 2009 qu’au premier, nos programmes de réductions de coûts ayant un impact croissant sur nos bénéfices. » Les documents que nous nous sommes procurés montrent que, pour continuer à réaliser de substantiels profits, la direction du groupe a, depuis 2003, progressivement délocalisé la production du site drouais vers le site hongrois de Szekesfehervar.

Le CCE a constaté que les volumes confiés à Dreux ont été réduits alors que le site hongrois a fait l’objet d’attribution de volumes supplémentaires. Ce transfert a ainsi provoqué des pertes alors que Dreux était bénéficiaire en 2008. Les membres du CCE ont aussi noté qu’aucune solution alternative n’a fait l’objet d’étude chiffrée et que le coût de la fermeture du site sera rapidement amorti.

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