Femmes à l’attaque

44 associations féministes veulent mettre l’égalité femmes/hommes au centre de 2012.

Pauline Graulle  • 7 juillet 2011 abonné·es

Vertu inattendue de l’affaire Strauss-Kahn : donner un coup de fouet au féminisme français. Le 21 mai, une semaine après le déferlement de commentaires misogynes provoqué par l’arrestation de l’ex-président du FMI, Osez le féminisme et La Barbe publiaient un texte au vitriol [^2] dénonçant la « fulgurante remontée à la surface de réflexes sexistes et réactionnaires, si prompts à surgir chez une partie des élites françaises » .

En ce début juillet, les féministes reviennent à la charge. Une fois n’est pas coutume, elles sont unies. Ironie du sort, on apprenait les mensonges de la « femme de chambre » au moment de leurs rencontres d’été à l’université d’Évry (Essonne), organisées par 44 associations. Six cents femmes et quelques hommes ont lancé dans un amphi archicomble un appel aux candidats de 2012. « L’égalité femmes-hommes doit être au cœur de la campagne. Que l’on voie clairement les positionnements » , a insisté Maud Olivier, vice-présidente du conseil général de l’Essonne.

Tonnerre d’applaudissements pour Caroline De Haas, porte-parole d’Osez le féminisme : « N’envisagez pas un seul instant de présenter un programme sans intégrer l’égalité femmes-hommes ! Si le droit des femmes reste un sous-paragraphe de note de bas de page, vous, les politiques, êtres condamnés à perdre les élections ! » Rappelant que 53 % des électeurs sont des électrices…

« L’égalité, c’est maintenant », texte amendé par 44 associations, pose dix exigences, dont la création d’un « ministère d’État des droits des femmes » , l’accès « libre et gratuit » à la contraception et à l’IVG, ou encore la création d’un service de la petite enfance pour favoriser l’égalité professionnelle « réelle » .

Quarante ans après le Manifeste des 343 salopes, les inégalités hommes-femmes sont toujours criantes. Favorisant la loi du plus fort, les politiques de rigueur néolibérales touchent plus durement les femmes : stagnation du Smic (perçu à 80 % par des femmes), explosion du temps partiel subi (majoritairement les travailleuses), détérioration des modes de garde des enfants, réforme des retraites pénalisant (encore plus) les retraitées, casse de l’hôpital public entravant l’accès à l’IVG… « Le vieux slogan “Un enfant si je veux quand je veux” n’a pas pris une ride , a souligné Carine Favier, présidente du Mouvement français pour le planning familial. D’autre part, l’État va se décharger de la prise en charge de la dépendance sur les femmes. »

Car l’apparent consensus sur l’égalité femmes-hommes ne saurait masquer de réels « clivages », a rappelé Réjane Sénac-Slawinski, chercheuse du CNRS : si Europe Écologie-Les Verts parle de « bouleversement de l’ordre sexué » et le PCF de « déconstruction du patriarcat » , la convention UMP du 21 juin s’intitulait « La place des femmes dans la société française : rendez-vous avec la modernité » (sic !).

Gare, donc, aux faux amis du féminisme. Aux positions faussement laïques de Marine Le Pen. À l’hypocrisie d’un gouvernement qui élève les violences faites aux femmes au rang de cause nationale mais coupe les subventions aux associations qui les accueillent… Gare à l’étendard « mixité = valeur ajoutée pour l’entreprise » du Medef, servi de manière un peu incantatoire par sa patronne, Laurence Parisot.

Hasard du calendrier, les députés communistes et du Parti de gauche viennent de déposer une proposition de loi en faveur de « mesures d’urgence contre le sexisme » . Suppression de la réduction des cotisations patronales lorsque l’employeur « ne s’engage pas à supprimer les écarts de salaire », congé parental de « 24 semaines rémunérées à taux plein » pour chaque parent, sanction du recours massif au temps partiel… Si la loi a peu de chances de voir le jour, elle rappelle que le combat des femmes est celui de toute la société.

[^2]: « Sexisme : ils se lâchent, les femmes trinquent », plus de 30 000 signataires.

Politique
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