Augmentation de la CSG : les retraités haussent le ton

Suite à l’appel de nombreux syndicats et associations, des milliers de retraités ont manifesté ce jeudi contre le gouvernement d’Emmanuel Macron et sa décision d’augmenter la CSG d’ici janvier 2018.

Pierre Steinmetz  • 28 septembre 2017
Partager :
Augmentation de la CSG : les retraités haussent le ton
© photo : CHRISTOPHE ARCHAMBAULT / AFP

Devant l’opéra de Paris, Juliette, 68 ans, s’échauffe les cordes vocales : « Les retraités en ont marre de se faire plumer », crie l’ancienne professeur au ciré jaune. Comme la foule de manifestant autour d’elle, Juliette a répondu à l’appel lancé par neuf syndicats et associations. Face à la hausse de la CSG – confirmée la veille par le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, devant la commission des finances de l’Assemblée nationale – CGT, FO, CFTC, FSU, Solidaires, FGR, UNRPA et LSR ont donc appelé ensemble les retraités français à descendre dans la rue, partout en France.

Et visiblement, au moment où le cortège de tête démarre à 14h30, Juliette n’est pas la seule à avoir répondu présente. Malgré un ciel menaçant, ils sont plusieurs milliers prêts à parcourir les 2 kilomètres pour rejoindre la rue de Miromesnil, dans le VIIIe arrondissement de la capitale.

Il faut dire que les retraités sont en première ligne face à la hausse de cette taxe censée financer la Sécurité sociale. Certes, l’augmentation de 1,7 point ne touchera pas chacun d’entre eux. D’après les estimations du gouvernement, 60 %, soit 8 millions de personnes, sont véritablement concernés (14 millions de retraités vivent en France). Autrement dit, un retraité touchant une pension inférieure à 1 200 euros par mois sera donc exonéré de CSG ou soumis à une CSG à taux réduite (3,8 %). En revanche, celui dont le revenu annuel est de 14 375 euros devra payer dès janvier 2018, non plus 6,6 % mais 8,3 % de CSG. Concrètement, un retraité touchant 2 000 euros de retraite par mois perdra environ 200 euros chaque année.

« Je suis à la retraite depuis même pas un an et on me retire déjà l’équivalent de 300 euros chaque année. C’est pas parce qu’on est retraité qu’on a pas le droit de vivre et de profiter de la vie », s’indigne Serge, 59 ans.

Une injustice de plus

Beaucoup de manifestants perçoivent ainsi cette annonce comme une injustice de plus. Ces dernières années, les décisions gouvernementales pénalisant les retraités s’accumulent. Depuis 2014, aucune pension n’a été revalorisée pour s’ajuster à un coût de la vie toujours plus cher. Par ailleurs, lors du quinquennat de François Hollande, une taxe supplémentaire avait été créée : la contribution additionnelle de solidarité pour l’autonomie (prélèvement sur les retraites de 0,3 %).

Dans ce contexte, les justifications de la majorité présidentielle sont peu audibles pour les manifestants. Ce matin, Barbara Pompili, députée LREM de la Somme, était l’invitée politique de Télé Matin sur France 2. Questionnée au sujet des manifestations d’aujourd’hui, l’élue de la somme relativise : « Il est vrai que l’on demande un petit effort à une catégorie de retraités. Il s’agit de 15 euros par mois pour des gens qui ont un revenu et qui peuvent se le permettre […]. On demande de faire un effort car d’autres catégories de la population, les jeunes notamment n’ont pas la chance qu’ils ont. »

Placée à la fin du cortège, Mireille répond : « On nous dit qu’il y a plus démunis que nous, mais personne n’a dit le contraire. Ce n’est pas un argument valable ! En tout cas, ça ne nous empêchera pas de revenir à la prochaine manifestation, bien au contraire ! »

« Macron applique la théorie du ruissellement. Il pense que s’il y a de l’argent en haut de la pyramide, cela va profiter à tout le monde, mais c’est faux ! En réalité on assiste à une redistribution des plus modestes, comme les retraités, vers les plus riches. Ces retraités ont raison de venir manifester, d’autant plus qu’ils ont largement été mis à contribution ces dernières années », explique quant à lui Adrien Quatennens, venu soutenir les manifestants avec quelques élus de la France insoumise.

Et cette fameuse « mise à contribution » risque de ne pas s’arrêter là selon Philippe Crevel. Interrogé sur la question au micro de France Info ce matin, l’économiste estime que « les retraités devraient perdre 5 à 15 % de pouvoir d’achat » sur les vingt prochaines années.

Soutenez Politis, faites un don.

Chaque jour, Politis donne une voix à celles et ceux qui ne l’ont pas, pour favoriser des prises de conscience politiques et le débat d’idées, par ses enquêtes, reportages et analyses. Parce que chez Politis, on pense que l’émancipation de chacun·e et la vitalité de notre démocratie dépendent (aussi) d’une information libre et indépendante.

Faire Un Don

Pour aller plus loin…

« Les idées d’extrême droite arrivent à prendre sur des territoires de la Résistance »
Entretien 10 juin 2025 abonné·es

« Les idées d’extrême droite arrivent à prendre sur des territoires de la Résistance »

Alors que des groupuscules d’extrême droite annoncent un rassemblement discret à Châteaubriant, le collectif Réveillons la Résistance organise une contre-mobilisation citoyenne le 14 juin. Entretien avec une de ses militantes.
Par Juliette Heinzlef
Contre-manifestation antifasciste à Montargis : « Si jamais on se tait, tout est perdu »
Reportage 10 juin 2025 abonné·es

Contre-manifestation antifasciste à Montargis : « Si jamais on se tait, tout est perdu »

À Montargis, petite ville du Loiret, le calme habituel a laissé place à un front populaire. Le 9 juin 2025, un cortège de 4 000 personnes a défilé contre la tenue d’un meeting d’extrême droite rassemblant Marine Le Pen, Jordan Bardella, Viktor Orbán et Matteo Salvini.
Par Thomas Lefèvre
Mineurs non accompagnés : après la répression policière, la répression administrative
Justice 7 juin 2025

Mineurs non accompagnés : après la répression policière, la répression administrative

Après l’expulsion de la Gaîté lyrique en mars, 23 jeunes ont reçu une obligation de quitter le territoire français (OQTF). Une répression vivement dénoncée par le collectif des jeunes du parc de Belleville. Vendredi 6 juin avaient lieu les premières audiences au tribunal administratif.
Par Élise Leclercq
Collectif des jeunes de Belleville : deux personnes interpellées suite à une plainte de Némésis
Enquête 7 juin 2025 abonné·es

Collectif des jeunes de Belleville : deux personnes interpellées suite à une plainte de Némésis

Deux hommes ont été placés en garde à vue après des plaintes du collectif fémonationaliste, venues perturber un meeting organisé contre les OQTF. Dix jours après les faits, les témoins dénoncent la coopération entre les militantes d’extrême droite et la police lors des interpellations.
Par Pauline Migevant