Richard Ferrand sauvé par la prescription

Le procureur de Brest a décidé de clore l’enquête visant le chef de file des députés macronistes dans l’affaire des Mutuelles de Bretagne.

Michel Soudais  • 13 octobre 2017
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Richard Ferrand sauvé par la prescription
© photo : CHRISTOPHE ARCHAMBAULT / AFP

Le procureur de Brest a annoncé vendredi le classement sans suite de l’enquête visant Richard Ferrand, chef de file des députés LREM, dans l’affaire des Mutuelles de Bretagne. Un décision dont l’éphémère ministre de la Cohésion des territoires, désormais président du groupe des députés de La République en marche, ne manquera sans doute pas de se prévaloir. « Il n’y a rien d’illégal », répétait-il après les premières révélations du Canard enchaîné. Sur ce point, le procureur de Brest lui donne raison. À un détail près.

« Les infractions d’abus de confiance et d’escroquerie » ne sont « pas constituées, faute d’un préjudice avéré », affirme le procureur Jean-Philippe Récappé, dans son communiqué de presse. Mais concernant l’éventuel délit de prise illégale d’intérêt, il ne lave pas Richard Ferrand de tout soupçon.

« La question est apparue complexe », note le procureur avant d’indiquer, et les mots ici sont lourds de sens, que « le parquet de Brest aurait pu envisager l’ouverture d’une information judiciaire ». S’il ne l’a pas fait, souligne-t-il, c’est uniquement en raison du fait que l’infraction éventuelle était prescrite depuis le 19 juin 2015 au vu des règles de prescription alors en vigueur (trois ans pour les délits).

Les faits, tels que les avaient établis Le Canard enchaîné, puis Le Parisien et Le Monde, ne sont pas contestés. Directeur général des Mutuelles de Bretagne (1998-2012), un organisme à but non lucratif, Richard Ferrand a utilisé ce qu’il savait des projets de la mutuelle pour permettre à sa compagne, l’avocate Sandrine Doucen, de s’enrichir.

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Le montage de l’affaire avait été assez peu orthodoxe puisque c’est Richard Ferrand qui avait signé, moyennant une clause de non-publicité pour que son nom n’apparaisse pas, la promesse de vente permettant ultérieurement à la SCI de sa compagne d’acquérir l’immeuble que les Mutuelles de Bretagne avaient décidé de louer. La promesse de location avait permis à Mme Doucen d’obtenir un prêt bancaire équivalent à la totalité du prix de ces locaux « en mauvais état ». Locaux rénovés ensuite complètement aux frais de la mutuelle pour une somme de 184 000 euros. La valeur des parts de la SCI « a été multipliée par 3 000 » en six ans, affirmait Le Canard, attestant le caractère juteux de l’opération.

Police / Justice
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