Prisons : l’association Genepi se voit sucrer sa subvention

La convention qui liait l’association et l’administration pénitentiaire a été unitéralement rompue par cette dernière.

Jean-Claude Renard  • 30 octobre 2018
Partager :
Prisons : l’association Genepi se voit sucrer sa subvention
© photo : BORIS HORVAT / AFP

La direction de l’administration pénitentiaire (DAP) a décidé de mettre fin à son partenariat avec le Genepi, association étudiante tournée vers les personnes incarcérées depuis quarante-deux ans. Le Genepi et la DAP étaient liés par une convention régissant le cadre du partenariat national, rappelle l’association sur son site, _« grâce auquel près de 2 000 personnes incarcérées ont bénéficié chaque année d’activités scolaires et socioculturelles mises en place par les 900 bénévoles de l’association ». Une convention essentielle pour cadrer et homogénéiser les actions en détention sur tout le territoire.

« Après plusieurs mois d’absence de dialogue, précise le Genepi, cette convention a été unilatéralement rompue le 20 septembre. Cette décision remet en cause la capacité du Genepi à poursuivre ses activités et menace la raison d’être de l’association. » La subvention s’élevait à 50 000 euros par an. Pour l’association, « le fond du désaccord repose sur des positions prises par ses groupes locaux pour dénoncer les conditions de vie indignes des personnes incarcérées auxquelles ces bénévoles ont été confrontés ».

Une liberté d’expression qui dérange

Il est vrai que le Genepi aime user de sa liberté d’expression. Une liberté d’expression qui dérange. Du côté de la DAP, on reproche à l’association un désengagement, avec une baisse régulière de ses interventions en détention, moins d’heures consacrées à l’enseignement pour les détenus. On oublie aussi que l’association a augmenté le nombre d’ateliers socioculturels tels que les revues de presse, le théâtre et les débats cinéma.

Déjà, depuis la suspension de cette convention, plusieurs bénévoles ont vu leurs actions annulées par l’administration pénitentiaire, « sans aucun dialogue », regrette le Genepi. C’est le cas pour le centre pénitentiaire sud-francilien (Réau, 77), la maison centrale de Poissy (78), le centre pénitentiaire de Fresnes (94). Diverses interventions en détention ont également été suspendues dans les régions Hauts-de-France, Rhône-Alpes-Auvergne, et sont menacées en Provence-Alpes-Côte d’Azur.

« Maintenir ce lien entre l’intérieur et l’extérieur »

« La décision de la DAP revient à nous fermer les portes des prisons malgré la volonté des bénévoles de poursuivre leurs actions auprès des personnes détenues, estime Maxime Boyer, président du Genepi. Nous souhaitons maintenir ce lien entre l’intérieur et l’extérieur, si nécessaire pour leur futur retour à la société. Ces actions sont d’autant plus primordiales que l’administration pénitentiaire n’est pas en mesure d’assurer le nombre d’heures d’activités en prison auxquelles elle est légalement tenue. »

En 2017 déjà, la DAP avait tenté de baisser drastiquement la subvention perçue par l’association (–42 %). L’intervention du ministre de la Justice, Jean-Jacques Urvoas, avait permis son maintien. Cette fois, Nicole Belloubet, garde des Sceaux, ne semble pas vouloir revenir en arrière.

Police / Justice
Temps de lecture : 3 minutes
Soutenez Politis, faites un don.

Chaque jour, Politis donne une voix à celles et ceux qui ne l’ont pas, pour favoriser des prises de conscience politiques et le débat d’idées, par ses enquêtes, reportages et analyses. Parce que chez Politis, on pense que l’émancipation de chacun·e et la vitalité de notre démocratie dépendent (aussi) d’une information libre et indépendante.

Faire Un Don

Pour aller plus loin…

« La violence est un attribut politique constant de l’extrême droite »
Entretien 30 septembre 2025 abonné·es

« La violence est un attribut politique constant de l’extrême droite »

À l’occasion du délibéré du procès des membres de l’Action des forces opérationnelles (AFO), groupuscule qui prévoyait des attentats contre les musulmans, les chercheurs Baptiste Roger-Lacan et Emmanuel Casajus reviennent sur le rapport historique de l’extrême droite à la violence.
Par Pauline Migevant
Terrorisme d’extrême droite : 9 membres d’AFO condamnés à de la prison ferme
Reportage 30 septembre 2025

Terrorisme d’extrême droite : 9 membres d’AFO condamnés à de la prison ferme

12 membres du groupe d’extrême droite islamophobe Action des forces opérationnelles (AFO) ont été reconnus coupables « d’association de malfaiteurs terroriste ». La peine maximale est de 2 ans de prison ferme, sous forme de détention à domicile avec bracelet électronique.
Par Pauline Migevant
Sarkozy condamné : « Il y a eu une atteinte à l’ordre public démocratique »
La Midinale 26 septembre 2025

Sarkozy condamné : « Il y a eu une atteinte à l’ordre public démocratique »

Évelyne Sire-Marin, magistrate honoraire et vice-présidente de la Ligue des droits de l’Homme, est l’invitée de « La Midinale ».
Par Pablo Pillaud-Vivien
« Affaire libyenne » : tout comprendre des condamnations
Décryptage 26 septembre 2025

« Affaire libyenne » : tout comprendre des condamnations

À l’image de huit autres accusés, Nicolas Sarkozy a été déclaré coupable de délits lui étant reprochés concernant le financement de sa campagne de 2007. Il est le premier président de la République être condamné à une peine de prison ferme. Explications.
Par Salomé Dionisi