À Gaza, un bilan et des découvertes insoutenables

L’exhumation de corps de Palestiniens renforce les accusations de massacre et de crimes de guerre contre l’armée israélienne.

Pierre Jacquemain  • 2 mai 2024 abonné·es
À Gaza, un bilan et des découvertes insoutenables
À l'hôpital al-Najjar à Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, le 29 avril 2024.
© AFP

Tandis que le bilan des victimes gazaouies ne cesse de s’alourdir – près de 40 000 morts depuis les actes terroristes du 7 octobre – et que la menace d’une intervention israélienne à Rafah, où se sont réfugiés près de 1,5 million de Palestiniens, reste une hypothèse sérieuse malgré les négociations sur une trêve, la découverte de fosses communes dans la bande de Gaza témoigne de nouvelles violations du droit international par Israël.

En milieu de semaine dernière, plusieurs centaines de corps ont en effet été exhumés dans deux hôpitaux de la bande de Gaza, selon les services de la défense civile. Certaines dépouilles avaient les mains attachées et ne portaient aucun vêtement, rapportent même les Nations unies. Et alors que de nombreuses autres personnes sont portées disparues, la défense civile redoute d’autres découvertes macabres.

Sur le même sujet : « À Rafah, les vivants envient les morts »

Selon Carmen Hassoun Abou Jaoudé, professeure à l’université Saint-Joseph de Beyrouth, experte en justice transitionnelle, interrogée par L’Orient-Le jour : «La plupart des corps exhumés sont non identifiables en raison de l’exhumation tardive. Considérées comme des témoins des massacres et des crimes de guerre, les fosses communes où les corps sont enterrés sans être identifiés constituent une violation flagrante du droit international et portent atteinte à la dignité humaine. Les processus d’exhumation et d’identification doivent être menés selon les normes internationales afin de permettre aux familles des victimes, qui sont dans une douloureuse attente, de faire leur deuil. » Et de conclure : «Je considère ces actions comme l’indication flagrante d’un massacre. Ce sont des preuves supplémentaires que des crimes de guerre sont en cours à Gaza. »

Ce sont des preuves supplémentaires que des crimes de guerre sont en cours à Gaza.

C. Hassoun Abou Jaoudé

La pression sur Israël, qui nie les faits reprochés tout en reconnaissant avoir examiné les cadavres pour vérifier s’il y avait des otages israéliens, s’accroît de jour en jour. Au point que Benyamin Netanyahou anticiperait même un mandat d’arrêt de la Cour pénale internationale contre lui, son ministre de la Défense et son chef d’État-major. Pas de quoi le déstabiliser. «Nous ne cesserons pas de nous défendre,assure-t-il. Quelle que soit la décision de la Cour, elle n’affectera pas les actions israéliennes », a-t-il déclaré. Et de promettre, dans le même temps, « d’accroître la pression militaire sur le Hamas, dans les prochains jours».

Sur le même sujet : « Il y a une volonté d’effacement du peuple palestinien »

Le Premier ministre israélien a même affirmé, il y a quelques semaines, qu’une date de l’offensive à Rafah a été fixée. «Nous devons détruire Rafah, Nuseirat et Deir al-Balah », ont même osé les ministres israéliens de la Défense et des Finances. L’esquisse d’une trêve à Gaza avec des libérations d’otages, selon les termes de la contre-proposition israélienne, mettra-t-elle fin à cette surenchère ? Selon certaines sources, les dirigeants du Hamas pourraient y être favorables. Mais les intentions des dirigeants israéliens demeurent inquiétantes.

Recevez Politis chez vous chaque semaine !
Abonnez-vous
Monde
Temps de lecture : 3 minutes

Pour aller plus loin…

Aux États-Unis, Donald Trump répand la peur des antifas
Reportage 29 octobre 2025 abonné·es

Aux États-Unis, Donald Trump répand la peur des antifas

En septembre, le président américain a qualifié le mouvement antifasciste d’organisation terroriste. Son positionnement est une escalade de plus en plus menaçante dans la bataille menée contre les militants de gauche du pays.
Par Edward Maille
Christian Tein : « Je pensais que l’époque des bagnards était révolue »
Entretien 28 octobre 2025 abonné·es

Christian Tein : « Je pensais que l’époque des bagnards était révolue »

Après un an de détention en métropole, le leader indépendantiste kanak revient sur sa situation et celle de la Kanaky/Nouvelle-Calédonie. Il dénonce l’accord de Bougival de l’été dernier et appelle à un accord qui termine le processus de décolonisation du territoire ultramarin.
Par Tristan Dereuddre
Aux États-Unis, « une esthétique de la peur au cœur de la médiatisation des expulsions »
Donald Trump 20 octobre 2025 abonné·es

Aux États-Unis, « une esthétique de la peur au cœur de la médiatisation des expulsions »

Chercheur spécialiste des expulsions forcées, WIlliam Walters décrypte la façon dont l’administration Trump organise sa politique migratoire. Il explique également comment la communication autour de ces pratiques violentes est présentée comme un « spectacle » pour le public américain.
Par Pauline Migevant
Comment Trump et les Gafam empêchent la résistance contre les expulsions forcées
Expulsion 20 octobre 2025 abonné·es

Comment Trump et les Gafam empêchent la résistance contre les expulsions forcées

L’application ICEBlock, qui permettait d’anticiper les raids des forces spéciales anti-immigration, a été fermée par Apple, en accord avec Donald Trump. Politis donne la parole à son développeur, en colère contre la trahison du géant américain.
Par Sarah Laurent