Un monde en trois minutes

Richard Hawley signe un album proche de la perfection, aussi brillant que sensible et délicat.

Jacques Vincent  • 10 septembre 2019 abonné·es
Un monde en trois minutes
© crédit photo : chris saunders

Il est très rare que l’écoute d’un disque soit interrompue par l’éclat lumineux d’un morceau, son évidence jubilatoire et enthousiasmante qui entraîne à l’écouter en boucle avant de passer à la suite sans pour autant s’en être lassé. Il est encore plus rare que cela se produise à plusieurs reprises.

C’est pourtant ce qui arrive avec le nouvel album de Richard Hawley. Dès l’ouverture avec l’entêtant « Off My Mind » et sa puissante simplicité qui surgit au milieu d’un crachotement électrique porté par un riff de guitare heavy d’une joyeuse efficacité. Le message est tout aussi basique : « Je ne peux t’enlever de ma tête/quelle que soit la façon dont j’essaie. » En fin de compte, c’est le morceau qu’on n’arrive pas à s’enlever de la tête.

« Off My Mind » illustre particulièrement bien ce propos tenu par Hawley dans une interview au New Musical Express à propos de ce disque : « Si c’était une tranche de bacon, ce serait une tranche sans gras. » Lui qui se dit collectionneur compulsif de 45 tours, et obsédé par les chansons de trois minutes, affirme ici la volonté, respectée à une exception près, de se tenir à ce format qui a fait les grandes heures de l’histoire du rock.

Même phénomène avec « Further », qui montre un autre visage de Richard Hawley, celui du crooner. Mais un crooner sans ostentation, préférant la profondeur feutrée aux envolées lyriques. Avec ses cordes et sa lap steel guitar, « Further » lorgne du côté d’un Johnny Cash et est aussi emblématique d’un goût prononcé pour les ballades. Et puis il y a « Galley Girl » et sa cavalerie électrique, mené tambour battant.

Il ne faudrait pourtant pas que la mise en lumière de ces trois titres projette une ombre sur des moments plus discrets. D’autant qu’au fil des écoutes d’autres compositions se révèlent comme des fleurs qui finissent par éclore. Toutes témoignent d’un soin apporté à l’écriture et aux sons, en particulier celui des guitares, modulé au gré des compositions – on soupçonnerait même Richard Hawley de collectionner les guitares vintage en plus des 45 tours – d’une délicatesse et d’une sensibilité parfaitement appropriées à la mélancolie qui en traverse la plupart. Further, qui a été un parfait compagnon pour l’été, pourra tout autant enchanter l’automne de ceux qui le découvrent aujourd’hui.

Further, Richard Hawley, BMG.

Musique
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