Manifestation à Vichy

Christophe Goby  • 13 novembre 2008 abonné·es

« Vous reprendrez bien un peu de
Vichy ? »
Voilà la formule percutante qu’a trouvée le collectif des Désobéissants (voir Politis n° 991) pour dénoncer la politique de l’Europe en matière d’immigration en se rendant dans l’ancienne capitale du régime pétainiste, qui recevait les 3 et 4 novembre derniers une brochette de ministres européens à l’occasion du Sommet de l’intégration. Ils étaient quatre militants grimés en déportés, avec des calots sur la tête et des poignées de cheveux en main, à chercher l’arrestation, afin de dénoncer aussi les prélèvements ADN.

Brice Hortefeux, le ministre de l’Identité nationale, souhaite que, pour un regroupement familial, les étrangers passent des tests de langue et chantent « la Marseillaise ». À la Cimade, on sait que le projet vise à interdire toute venue de la famille en France. Tout en ne laissant passer que les « cerveaux », comme l’explique Jacques Barrot, député de la Haute-Loire et commissaire européen. En Européen convaincu, il déplore que « les immigrés très qualifiés […] partent aux États-Unis » et demande de la sévérité envers l’immigration irrégulière.

Fadela Amara, elle, « trouve dégueulasse » qu’on traîne la ville de Vichy dans la boue. La ministre n’est pas choquée de participer au renforcement de l’Europe forteresse, dont Vichy offre ces trois jours un modèle réduit, soit un concentré de sécurité. Laurent, membre de la Canaille du Midi, une chorale militante de Toulouse, raconte comment la police a géré la manifestation de 3 000 personnes en direction de Cusset, la ville communiste qui jouxte la ville d’eau. « La police a provoqué, et c’est parti » en véritable scène d’émeute. « La manif a démarré correctement, explique Nicolas, du Réseau éducation sans frontières, j usqu’au moment où elle est tombée sur un barrage anti-émeute en plein centre-ville, absolument pas au programme négocié entre la préfecture et l’organisation. » Le lendemain, des campeurs furent dégagés à coups de pied – l’accueil a ses limites – pendant qu’une partie des derniers manifestants était interpellée. La liberté de circulation est un vain mot, même pour les Français en règle.

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