Chercheur de justice

Au moyen d’archives
et de témoignages, France Culture retrace
le combat du scientifique Henri Pézerat
contre l’amiante.

Jean-Claude Renard  • 25 mars 2010 abonné·es

Par Inès Léraud et Guillaume Baldy, voilà un documentaire consacré à un compagnon de route de l’écologie, défenseur de la santé au travail. Chercheur au CNRS, disparu en 2009, Henri Pézerat a surtout été celui par qui le scandale de l’amiante est arrivé. Et qui a permis des condamnations. « Si l’amiante a été interdit, rappelle d’emblée Inès Léraud, si des milliers d’ouvrières et d’ouvriers de diverses industries ont été reconnus en France comme victimes de maladies professionnelles, obtenant la reconnaissance de la faute inexcusable de leur employeur qui les avait consciemment exposés à des cancérogènes, c’est en partie grâce à lui. Sa première lutte, la plus longue et la plus importante est celle contre l’amiante. Elle commence dans le climat politique des années 1970 à Jussieu et aboutit à l’interdiction du minéral en 1996, ouvrant au droit à la réparation des victimes. »

Le premier volet, celui « du temps des prises de conscience », revient sur la jeunesse du scientifique, ses études à Lyon, son engagement au Parti communiste puis son désengagement, son arrivée au CNRS en 1968, au poste de chimiste spécialiste des cristaux, et ses premiers travaux, ses enquêtes au sein de la manufacture d’amiante Amisol, à Clermont-Ferrand. ­D’autres motifs d’empêcher de tourner en rond ont aussi rempli son temps, des mines de fer et de charbon aux ouvriers intoxiqués par le plomb ou l’arsenic. Un volet nourri de témoignages, de chercheurs, d’ouvriers et d’archives d’entretiens avec Pézerat.

Le second volet, « le temps de la lutte », montre le réseau d’acteurs de la santé au travail mis en place par Henri Pézerat, avec l’intervention de sa compagne, Annie Thébaud-Mony, sociologue, et de Jean-Paul Teissonnière, qui sera l’avocat des victimes. Un réseau qui a été à l’origine de nombre de procès et de la pression médiatique. Le combat de Pézerat s’est aussi poursuivi aux côtés des militants indiens et de Greenpeace pour le rapatriement du Clemenceau en France, et auprès des ouvriers de l’usine Adisseo, à Commentry, dont les employés furent victimes d’une épidémie de cancers du rein.

Clairement, estime Inès Léraud, la recherche chez Pézerat s’inscrit « du côté de la prévention, de la santé et de la dignité, en contre-pouvoir des puissances de l’argent ». Et c’est dans cet état d’esprit qu’a été créée, en 2009, la Fondation Henri-Pézerat travail-santé-environnement. Au diapason d’une personnalité obstinée, et juste.

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