Les superprofits de TotalEnergies, carburant de la grève

Le mouvement social se poursuit chez les salariés du pétrolier, désormais rejoints par ceux d’Esso-ExxonMobil. Le gouvernement se raidit et annonce des réquisitions de personnels parmi ces derniers.

Rose-Amélie Bécel  • 11 octobre 2022
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Les superprofits de TotalEnergies, carburant de la grève
© Photo : Lou BENOIST / AFP.

Après quinze jours de grève, la mobilisation ne faiblit pas chez les salariés de TotalEnergies. À l’appel de la CGT, les grévistes bloquent plusieurs raffineries et dépôts de carburant du géant pétrolier français, rejoints par des salariés de la société américaine ExxonMobil.

Tous demandent l’augmentation des salaires de 10 % pour l’année en cours, face à l’inflation mais aussi aux superprofits engrangés par Total. Au premier semestre 2022, le groupe a réalisé 10,6 milliards de dollars de bénéfice. L’an dernier, les profits avaient déjà augmenté de 40 % par rapport à 2019. Le tout sans payer d’impôt sur les sociétés en 2020 et en 2021, selon les révélations de l’économiste Maxime Combes publiées cet été par le média en ligne Basta !

Mais Patrick Pouyanné, PDG de Total­Energies, a le sens du partage. En 2021, il s’est augmenté de 52 % pour porter sa rémunération à 5,9 millions d’euros par an. Et, deux jours après le début de la grève, le groupe a annoncé le versement d’un euro de dividende supplémentaire par action au mois de décembre, augmentant de 2,6 milliards la rétribution des actionnaires.

Oubliés des superprofits, les employés réclamaient initialement une revalorisation salariale, mais aussi le dégel des embauches et la fin du recours aux contrats ­précaires (CDD et intérimaires). Samedi 8 octobre, dans une lettre ouverte adressée à Patrick Pouyanné, la CGT s’est dite prête à débuter les négociations dès le 10 octobre « sur les bases de notre revendication salariale seule ». Mais, de son côté, le groupe refuse de négocier avant la fin des blocages.

Réquisition de personnels

En attendant, près d’un tiers des stations-service connaissent des difficultés d’approvisionnement, selon les chiffres du gouvernement. Le gouvernement tente désormais de casser la grève. Après la reconduction de cette dernière, mardi 11 octobre, Élisabeth Borne a annoncé, lors des questions au gouvernement à l’Assemblée nationale, avoir demandé aux préfets d’organiser « la réquisition des personnels indispensables au fonctionnement des dépôts » d’Esso-ExxonMobil.

Lundi 10 octobre, en marge d’un déplacement en Mayenne, Emmanuel Macron y était allé de son commentaire : « Le blocage, ce n’est pas une façon de négocier. » La réaction du président de la République, opposé une taxation des superprofits, n’est pas étonnante.

Le groupe TotalEnergies cristallise les revendications. Elles s’exprimeront dimanche 16 octobre, lors de la marche contre la vie chère et l’inaction climatique, organisée à l’initiative de la Nupes.

Le 7 octobre, le gouvernement a déposé un amendement au projet de loi de finance 2023, actuellement discuté à l’Assemblée. Il n’y est pas question de taxation mais d’une « contribution temporaire de solidarité », qui s’aligne avec la décision prise au niveau de l’Union européenne le 30 septembre dernier.

Demandée seulement aux énergéticiens dont les résultats de 2022 dépassent de plus 20 % la moyenne de ceux des quatre années précédentes, la contribution est bien maigre. Selon le ministre de l’Économie, la mesure devrait rapporter 200 millions d’euros au total.

Avec ses bénéfices records et son empreinte carbone supérieure à celle de tout le territoire français, le groupe TotalEnergies cristallise les revendications. Elles s’exprimeront dimanche 16 octobre, lors de la marche contre la vie chère et l’inaction climatique, organisée à l’initiative de la Nupes.

Économie
Temps de lecture : 3 minutes
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