« Le gamin au vélo » des frères Dardenne : Un film ensoleillé

Avec le Gamin au vélo, Luc et Jean-Pierre Dardenne révèlent un jeune acteur extraordinaire : Thomas Doret.

Politis  • 19 mai 2011
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Combien de jeunes acteurs extraordinaires Luc et Jean-Pierre Dardenne découvriront-ils ? Depuis la Promesse (1996), où apparaissait pour la première fois Jérémie Renier, devenu depuis leur comédien fétiche, Émilie Dequenne ( Rosetta ), Morgan Marinne ( le Fils ), Déborah François ( l’Enfant ), Arta Dobroshi ( le Silence de Lorna ) ont été révélés par les frères cinéastes. Et c’est encore le cas avec Thomas Doret dans leur nouveau film, le Gamin au vélo . Thomas Doret interprète Cyril avec une évidence incroyable, petit blond de 12 ans sans mère et, au début du film, à la recherche de son père (Jérémie Renier, désarmant en père fuyant son fils, incapable de lui faire une place, de lui offrir un peu de lui-même). Un gamin résolu tel un poing fermé, à la détermination sans entraves, un « pitbull » , comme le surnomme l’un des personnages.

Les films des Dardenne relèvent, dans la fiction, du cinéma direct. Pas d’information supplémentaire au spectateur que ce qui lui est donné de voir par des personnages qui rentrent dans le champ sans apprêt, filmés, au présent, dans le mouvement de leurs actions, de leurs aspirations. Un cinéma qui ne commente ni n’explique, mais qui montre et se charge de sens à mesure que se dessinent les enjeux entre les personnages, à travers les mots, les gestes, le rapport aux objets… Un cinéma de la « vie matérielle », dont l’âpreté n’interdit plus la douceur ni la tendresse. Le Gamin au vélo n’est certainement pas la première comédie de Luc et Jean-Pierre Dardenne, mais ils signent là leur premier film ensoleillé. Parce que l’image y a la luminosité de l’été, mais aussi grâce à l’entrée dans la vie de Cyril d’une femme, Samantha, interprétée avec nuance par Cécile de France, qui le prend sous son aile maternelle.

Leur rencontre se fait dans une salle d’attente. Alors qu’on essaie de rattraper Cyril à la recherche de son père pour le remettre dans son foyer, il s’agrippe à Samantha jusqu’à lui faire mal. Tout est dit dans ce plan. Le besoin d’amour peut pousser à la violence. L’étreinte d’un enfant peut à la fois faire mal et être bouleversante. Samantha n’est pas l’Irène (Ingrid Bergman) d’ Europe 51 , le film de Rossellini. Son élan vers ce garçon n’a d’autre justification que ce qui pourrait, au départ, s’appeler un geste désintéressé. Ce ne sont pas alors les liens du sang qui parlent, mais ceux qui peuvent s’établir entre deux inconnus capables de s’accueillir l’un l’autre. N’est-ce pas là le socle d’une civilisation ? L’amour que Samantha dispense au gamin se nomme aussi respect d’autrui, éthique du comportement, canalisation de la violence. Le garçon ne sera pas un « enfant sauvage ». Il ne connaîtra pas d’« enfance nue ».

Culture
Temps de lecture : 3 minutes
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