Femmes en guerre

D’Alice Schalek à Camille Lepage, Sigrid Faltin signe un documentaire instructif, diffusé ce mercredi 4 juillet sur Arte sur plusieurs générations de femmes photographes sur les champs de bataille.

Jean-Claude Renard  • 3 juillet 2018
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Femmes en guerre
© photo : SWR/Sigrid Faltin

Christine Spengler a couvert tous les conflits planétaires. Avec près de quarante années derrière l’objectif. Au Tchad, au Vietnam, en Irlande du Nord, au Sahara occidental, en Afghanistan, en Iran… Elle n’est pas seulement une photographe, mais aussi une artiste-peintre qui, à l’occasion d’une rétrospective de ses reportages, colorise ses images, peint des scènes de guerre.

Si Spengler est le fil rouge contemporain, commentant le travail de ses aînées, c’est Alice Schalek (1874-1956) qui ouvre ce documentaire de Sigrid Faltin consacré aux femmes photographes de guerre, nourri d’archives, d’entretiens et d’images. Schalek cadre les conflits dès la Grande Guerre, du côté des Dolomites, où se trouvent les Autrichiens. De quoi rendre jaloux la gente masculine de la bourgeoisie misogyne qui n’accepte pas une femme sur le front, de quoi aussi agacer les officiers de presse par ses audaces, sa présence tenace sur le terrain. Dans les années 1930, pour échapper aux nazis, elle devra s’exiler à New York.

La mort, « le tribut à payer quand on fait ce métier »

Allemande d’origine juive et militante socialiste, Gerda Taro (1910-1937) en a peut-être fait son modèle, parcourant les champs de bataille de la guerre d’Espagne, après avoir fait ses premières armes photographiques dans le Paris artistique de Montparnasse dans l’entre-deux-guerres, et rencontré celui qui deviendra son compagnon, Robert Capa. Les historiens auront du mal à distinguer leurs images (sinon que celles de Gerda Taro sont plus souvent tirées dans un format carré), jusqu’à la fameuse découverte de la « valise mexicaine » de Capa, somme colossale d’archives de leur travail en commun. Trop près, trop proche de son sujet, intrépide aussi, elle meurt écrasée par un char républicain, première victime féminine sans doute dans l’exercice du métier.

Plus tard, c’est Lee Miller (1907-1977), muse de Man Ray et de Cocteau, avec des clichés sur la Seconde Guerre mondiale, suivant les Alliés, collée à son Rolleiflex. Elle en sortira dans un état dépressif, avec un trou noir de vingt ans.

La mort, c’est aussi « le tribut à payer quand on fait ce métier », observe Christine Spengler, dont les murs de la chambre à coucher sont tapissés de ses images de guerre. Ce sera le cas, notamment en 2014, de l’Allemande Anja Niedringhaus, abattue par un policier afghan et de la Française Camille Lepage, tuée lors d’un reportage sur le coup d’État en Centrafrique.

Femmes photographes de guerre, mercredi 4 juillet, à 22h40, sur Arte et sur Arte +7 jusqu’au 11 juillet.

Cinéma
Temps de lecture : 2 minutes
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