Retraite, le nouveau combat des profs ?

Dans le cortège syndical de la manifestation parisienne contre la réforme des retraites, de nombreux enseignants étaient présents. Une première journée d’action pour se retrouver avant d’envisager la suite de la mobilisation contre Blanquer ?

Matthias Hardoy  • 24 septembre 2019
Partager :
Retraite, le nouveau combat des profs ?
Photo : Les professeurs assez nombreux lors de cette première manifestation contre la réforme des Retraites.
© M.H. / Politis

Ce mardi après-midi place de la République à Paris, difficile de trouver des lycéens ou des étudiants même si l’UNL et l’UNEF avaient rejoint les syndicats de salariés dans leur appel à la mobilisation. Mais impossible de rater les professeurs venus plutôt en nombre en cette première journée interprofessionnelle de manifestation contre la réforme des retraites.

À lire aussi >> Une rentrée en trompe-l’œil

« Une accumulation dure à encaisser »

Derrière les drapeaux du Snes, des ballons de la FSU et de Solidaires, les profs interrompent volontiers leurs discussions passionnées pour expliquer les raisons de leur présence : « Après s’être pris toutes les réformes de l’Éducation de Blanquer, celle de la fonction publique, maintenant on se prend en pleine tête celle des retraites. On est dans la même logique globale de casse du service-public. Cette accumulation est dure à encaisser et nous met en colère », explique Florent, jeune professeur en Seine-Saint-Denis.

Une des ses collègues, qui a préféré garder l’anonymat, abonde dans son sens : « La dégradation de l’Éducation nationale profite au secteur privé, celle du système des retraites va aboutir à un système privé par capitalisation. Et tout cela se fait petit à petit bien sûr, de façon vicieuse ! », dénonce la jeune femme.

Nicolas Lebel, professeur d’anglais en lycée insiste sur le point d’indice : « Nous savons que dans la retraite à points, le point va varier et que chacun pourra y perdre. » Même s’il pense que cette journée sera « un coup d’épée dans l’eau », il voulait être là aussi pour dénoncer « ce système d’éducation qui devient low cost avec notamment de plus en plus d’enseignants contractuels ».

À lire aussi >> En guerre contre Blanquer !

Du prosaïque au combat philosophique

Un peu plus loin, Julie, professeur en collège depuis septembre, avoue plus prosaïquement que c’est la simulation de sa future retraite « pas du tout glorieuse » qui l’a poussée à manifester. Cathy est elle professeur en lycée professionnel depuis plusieurs années. C’est contre la réforme du lycée que, principalement, elle se mobilise. En juin dernier, elle était déjà vent debout contre « l’inadaptée » réforme « à la philosophie purement libérale » qui va faire, à son désespoir « du bac pro un sous-bac ». Elle n’a pas changé d’avis, mais n’est pas des plus optimistes sur l’avenir de la lutte, après une mobilisation en juin « en demi teinte », elle se demande comment la mobilisation contre les réformes Blanquer va bien pouvoir rebondir. Aujourd’hui, elle voit le verre plutôt à moitié vide : « On n’est pas si nombreux que cela alors que la situation est grave et que contrairement à ce qu’il se passait ce week-end, il n’y a pas vraiment de risque de violences. »

Du côté des plus jeunes, on est un poil plus enthousiaste, Florent de Seine-Saint-Denis espère « que le fait de se mêler à d’autres professions, va permettre de nous redynamiser ». De toute façon, « nous mobiliser seuls n’avait plus du tout d’impact » nuance toutefois réaliste sa jeune collègue.

À lire aussi >> École : l’assaut des technos

Soutenez Politis, faites un don.

Chaque jour, Politis donne une voix à celles et ceux qui ne l’ont pas, pour favoriser des prises de conscience politiques et le débat d’idées, par ses enquêtes, reportages et analyses. Parce que chez Politis, on pense que l’émancipation de chacun·e et la vitalité de notre démocratie dépendent (aussi) d’une information libre et indépendante.

Faire Un Don

Pour aller plus loin…

Pour en finir avec la centralité du travail
Travail 6 novembre 2025

Pour en finir avec la centralité du travail

Alors que le travail génère souvent de l’insatisfaction, en prise à des conditions toujours plus précaires, il reste présenté comme une valeur indépassable dans nos vies. Une centralité qui semble anachronique avec la catastrophe écologique, selon l’économiste Alain Coulombel.
Par Alain Coulombel
Expulsion illégale : une famille porte plainte contre le préfet des Hautes-Alpes
Enquête 5 novembre 2025 abonné·es

Expulsion illégale : une famille porte plainte contre le préfet des Hautes-Alpes

Une plainte pour « abus d’autorité » a été déposée contre le préfet des Hautes-Alpes par une famille expulsée illégalement en septembre. Celle-ci était revenue en  France traumatisée et la mère avait fait une fausse couche, attribuée au stress causé par l’expulsion.
Par Pauline Migevant
Mouvement social de 1995 : la naissance d’une nouvelle génération politique
Récit 5 novembre 2025 abonné·es

Mouvement social de 1995 : la naissance d’une nouvelle génération politique

Le grand mouvement social de 1995 a vu l’apparition d’une dizaine de futurs visages de la gauche, des figures qui, en trois décennies de vie publique française, n’ont jamais abandonné le combat. Très souvent en faveur de l’union de la gauche.
Par Lucas Sarafian
1995, l’année où le syndicalisme s’est réinventé
Syndicats 5 novembre 2025

1995, l’année où le syndicalisme s’est réinventé

Dans un contexte de fin des utopies politiques et de tournant social-libéral, le mouvement de 1995 catalyse une recomposition syndicale profonde. L’unité d’action, l’émergence de nouvelles organisations et le rôle central des assemblées générales en font le point de départ d’un renouveau syndical toujours inachevé.
Par Benoît Teste