Primaire EELV : à Paris, Hulot éclipse Joly

Au cours du deuxième débat de la primaire écologiste organisé hier soir à Paris, Nicolas Hulot s’est mis la salle de la Bellevilloise dans la poche, malgré sa volonté réaffirmée d’« ouverture ». À ses côtés, une Eva Joly au charisme limité, un Stéphane Lhomme trop agressif et un Henri Stoll bien consensuel.

Xavier Frison  • 10 juin 2011
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Primaire EELV : à Paris, Hulot éclipse Joly
© Photo : Bertrand Guay / AFP

« Tu fumes pas des pétards, toi ? » À la sortie du deuxième débat de la primaire Europe écologie – Les Verts (EELV), organisé hier soir dans le XXe arrondissement de Paris, les partisans d’Eva Joly ont besoin de réconfort. Les deux heures d’échanges entre les quatre candidats EELV dans la fournaise de la Bellevilloise n’ont pas franchement été à l’avantage de la députée européenne. Campée sur les fondamentaux du programme écologiste, auréolée d’une belle image d’intégrité, applaudie chaleureusement par le public avant l’ouverture des micros, Eva Joly aura pourtant souffert, si ce n’est sombré, dans le cruel exercice de la joute oratoire. Entre Stéphane Lhomme le rentre-dedans, Henri Stoll l’écolo bonhomme et Nicolas Hulot la star médiatique habitée pour la première fois d’un discours politique offensif et assumé, l’oxygène est soudain devenu denrée rare.

D’emblée, Stéphane Lhomme, le militant anti-nucléaire, montre les crocs. « Il y a une grande colère à la base du mouvement par rapport au problème Hulot. » La salle explose, hostile à ce qu’elle considère comme une attaque personnelle, strictement prohibée par la charte signée des quatre candidats. « Ce n’est pas une attaque personnelle, mais un problème 100 % politique » , rétorque Lhomme, qui évoque les ex-mécènes de monsieur Ushuaïa. « Il nous arrive de la planète TF1. » Pendant que les caméras des chaînes d’info fondent de plaisir, la salle est définitivement perdue pour le président de l’Observatoire du nucléaire, qui franchira encore la ligne verte à l’occasion d’une ou deux perfidies. Dommage, tant, sur le fond, le militant Lhomme sait soulever des questions pertinentes.

Chahuté, Nicolas Hulot ne pouvait rêver meilleure mise sur orbite. « Je subis sans broncher parce que l’enjeu mérite de passer au-dessus » de « ce petit poison en procès écologique » , peut-il commencer, grand seigneur. Avant d’enchaîner, plus frontal : « Que sait Stéphane Lhomme de ce que moi et ma Fondation avons fait comme succès parfois silencieux depuis 20 ans, rien ! » Et l’ex-animateur télé de dérouler un discours à la tonalité très politique. Et offensif, avec ça. « Un score à deux chiffres est à notre portée » , lâche Hulot, avant de faire claquer les formules qui auront manqué à ses adversaires tout au long de la soirée : « Je veux porter l’écologie de l’action et pas l’écologie de la sanction, l’écologie de la conviction (…) pas de la punition » , l’écologie du « rassemblement » , «pas du  clivage » .

Galvanisé, Nicolas Hulot choisit d’assumer une des rares vraies différences de fond entre les quatre candidats. Il prône, enflammé, une écologie « décomplexée » , qui n’a « pas peur d’ouvrir ses bras » à partir du moment où « on ne renie pas nos fondamentaux. Oui, j’assume ce choix. » Applaudissements nourris, dont on a du mal à conclure, dans l’euphorie collective du moment, s’ils marquent une véritable approbation des militants au pari de l’ouverture à la sauce Hulot.

Dans la douceur de la nuit parisienne, attablés devant quelques pintes de bière et planches de charcuterie-fromage, les proches d’Eva Joly sont bien loin de ces considérations. Entre mines déconfites et analyse de la soirée, les plus optimistes se tournent déjà vers le prochain débat, mercredi 15 juin à Lille. Pour corriger l’image trop terne de l’ancienne juge d’instruction, une élue EELV propose : « Il faut lui faire parler de foot à Lille, une blague en Ch’ti, avec son accent ce sera marrant » . Moue sceptique d’un militant expérimenté : « Euh, attention hein, Eva c’est pas une grande comique. Et quelqu’un de pas drôle qui essaye de faire rire… » L’addition, s’il vous plaît.

Politique
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