Post-poèmes (À flux détendu)

Consume rouge (éd. Al Dante, 96 p., 24 euros), de Sylvain Courtoux, bel objet à épines.

Christophe Kantcheff  • 8 mai 2014 abonné·es

C’est un grand livre cartonné, avec en couverture deux jolies femmes. À ceci près que les donzelles ont pour visage un crâne. Deux têtes de mort, mais élégantes et souriantes. C’est ainsi que s’offre Consume rouge (éd. Al Dante, 96 p., 24 euros), de Sylvain Courtoux, bel objet à épines. Les nerfs à vif contre l’état des choses, Sylvain Courtoux a le désespoir en ébullition. « L’univers est-il coupable quand tu es plus noir que la mort ? » Son inclination destructrice, il la retourne en violence de l’écriture. « Ce dont tu ne peux parler il faut le construire. » Sniper du verbe, il pratique la post-poésie de combat. La post-poésie ? Une hybridation, non affiliée à la seule poésie mais constituée de bien d’ « autres genres, sous-genres et autres activités/productions : musique, science-fiction, bande dessinée… » Le livre intègre d’ailleurs la bande-son du texte, élaborée par le post-poète, un CD intitulé Death by a Thousand Sources. Sylvain Courtoux se range résolument aux côtés des perdants de l’histoire et des réfractaires. « Comment rester encore humain dans un monde régi par les ordinateurs, la bourse impériale, les instituts de marketing, de sondage, les directions R.H. ? » Au vitriol de ses mots, tout doit disparaître pour renaître. Adepte du sampling, il respire grâce aux poètes indociles – de Jean-Pierre Duprey à Manuel Joseph en passant par Kathy Acker –, et plus largement dans le souffle de ceux qu’il perçoit comme ses frères et sœurs de lutte. Ainsi, d’Annie Ernaux, auteure de cette phrase incandescente : « La littérature existe puisque j’en souffre. » Chez Sylvain Courtoux la mort rôde, toujours. Dans ses veines, le poison d’un drame. « Thérèse Rossignol-Courtoux s’est défenestrée le 6 août 1987 du dixième étage d’un H.L.M. à Clermont-Ferrand après avoir ingéré des barbituriques. Elle venait d’avoir 37 ans. » Il précise : « Thérèse Rossignol-Courtoux était ma mère. »

Culture
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