« Nos conversations célestes », de Jean-Christophe Attias : Une quête intérieure

Jean-Christophe Attias propose un premier polar profond et insolite.

Laura Alcalaï  • 18 mars 2020 abonné·es
« Nos conversations célestes », de Jean-Christophe Attias : Une quête intérieure
© Jean-Luc & Francoise Ziegler/afp

Lorsqu’un éminent historien des religions, spécialiste de la pensée juive médiévale, s’attaque au roman policier, forcément le résultat est déroutant. Avec Nos conversations célestes, Jean-Christophe Attias, auteur d’un Moïse fragile, prix Goncourt de la biographie en 2015, s’aventure cette fois sur les chemins troubles de la fiction.

Depuis six semaines, Ben Halfman a disparu. Ce professeur d’un petit institut universitaire poussiéreux et indolent est certes réputé fantasque et subversif, mais sa soudaine disparition inquiète. Le doyen charge un de ses collègues, Jacques, de se lancer à sa recherche. Il lui adjoint la secrétaire et amante d’Halfman, une jolie blonde répondant au doux nom de Mauricette, dont le visage trahit les turbulences. À l’opposé, Jacques est un introverti mélancolique et indécis, coupé de ses passions. Leur recherche les conduit sur d’étranges chemins de traverse, au contact de personnages inquiétants.

Imperceptiblement, le sujet du roman lui aussi se déplace. Ce n’est plus la piste d’Halfman mais la quête elle-même. Ce sont des lieux : le Paris populaire, les rives de la Manche, embrumées de mélancolie, et enfin Kfar Aloum, un improbable village des oubliés, en Israël, où un rabbin marginal leur révèle que toute enquête est d’abord une quête intérieure.

« Nos maîtres, dit le rabbin, enseignent que l’homme doit aimer Dieu de ses deux cœurs […]_, celui qui le porte au Bien comme celui qui le porte au Mal »_. L’aimer d’un seul cœur, c’est être soi-même « un homme amputé ». Si « Halfman » est une moitié d’homme, qui donc est cette autre partie de lui-même ? Seuls les anges pourraient avoir la réponse, mais les mots de leurs « conversations célestes » ne nous parviennent qu’imparfaitement, traduits en désordre par l’écrivain. Le reste appartient au mystère d’un récit singulier qui emporte le lecteur peut-être au fond de lui-même.

Nos conversations célestes, Jean-Christophe Attias, Alma éditeur, 330 pages, 18 euros. Disponible en Epub (12,99 euros) sur le site de l’éditeur.

Littérature
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