La Quéquette à Jésus

L’Eglise secouée par le scandale des prêtres pédophiles.

Un scandale aux dimensions de l’ordinaire pudibonderie de la tradition chrétienne.

Bernard Langlois  • 27 mars 2010
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C’était en 1989, quand ### Politis était encore un tout jeune hebdo.

Illustration - La Quéquette à Jésus

Il s’agissait d’illustrer en couverture le dossier de la semaine (signé Bertin) consacré aux abus de la restauration artistique en général, et de la chapelle Sixtine en particulier, où l’hypocrisie vaticanesque avait, au détour des années 1550 (concile de Trente), ordonné qu’on couvrit les membres virils des nombreux nus (les « Ignudi » ) dont Michel-Ange, le coquin, avait agrémenté son plafond.

Illustration - La Quéquette à Jésus

Les peintres chargés de ce travail de salubrité publique (et pudique) furent justement appelés les « B r a g h e t t o n i »

Or donc, pour rire un peu, nous avions choisi ce titre de“ une”, un tantinet provocateur, allusion à une comptine enfantine (ces petits saloupiaux ne respectent rien) qui se chantait quand j’étais gosse sur l’air passe partout des « Chapeaux ronds » (et vivent les Bretons !)

Illustration - La Quéquette à Jésus

J’en rappelais le texte, d’une grande noblesse d’inspiration, en exergue de l’édito : «Jésus-Christ a une quéquette/ Pas plus grosse qu’une allumette/ Il s’en sert pour faire pipi/ Vive la quéquette à Jésus-Christ ! »

Les curés aussi ont des quéquettes, et il en est que ça travaille énormément.

Faut dire que l’obligation qui leur est faite de ne point prendre épouse (si elle a son bon côté …) n’est pas de nature à calmer leur libido : car, que voulez-vous, les prêtres sont des hommes, et ils ont une libido. Et sublimer, sublimer, mon bon Sigmund, ça ne va pas toujours de soi … Les moins doués auront plutôt tendance à refouler.

D’où quelques dérapages, notamment auprès de ces jeunes garçons qu’ils encadrent dans les collèges, les patronages ou autres camps scouts ; ou qui leur servent la messe : la main du pasteur s’égarant parfois du côté des burettes de l’enfant de chœur …

Soyons sérieux deux minutes.

D’abord pour récuser l’idée que tous les prêtres sont pédophiles, quoi qu’en pensent les anti-calotins primaires : il en est beaucoup de dévoués à leur sacerdoce et de fidèles à leurs vœux.

Ensuite pour reconnaître que le célibat imposé est un sacré boulet, que de nombreux ordonnés quittent leur charge à cause de cette règle (qui date, semble-t-il, du troisième siècle de l’église romaine et ne s’applique qu’à elle) où vivent dans la douleur — la leur, mais aussi celle de leur conjointe et parfois de leurs enfants — des amours clandestines.

Mais Rome reste inflexible.

Quant aux cas de pédophilie avérés, graves évidemment pour les victimes, ils font d’autant plus scandale que la religion catholique s’est montrée au fil des ans (depuis la fin du Moyen Age , semble-t-il, époque où l’on était moins pudibond) d’un rigorisme exagéré, pour ne pas dire grotesque, en matière de sexe.

Combien d’enfants, d’adolescents qu’on a tenté de terroriser avec « le péché de chair » ? Et conséquemment, combien, chrétiennement éduqués, qui ont jeté la religion avec leur gourme — puisqu’on leur avait fourré dans le crâne que rien n’était licite « hors les liens sacrés du mariage » ? Et combien encore qui, se découvrant une sexualité « déviante » , se sont crus damnés ?

D’où vient donc cette pudibonderie imbécile, cette hypocrisie pateline,en rupture avec les joyeusetés du paganisme antique, bien sûr, mais surtout, dont on ne trouve pas trace dans les Evangiles ?

Ceux-ci nous montrent au contraire un Christ qui refuse de condamner la femme adultère et festoie avec les prostituées (il vire aussi les marchands du Temple, mais ça aussi, l’Eglise l’a oublié …) !

Voilà donc une Institution qui impose à ses fidèles un ordre moral extraordinairement contraignant ; et qui, jusqu’à une date récente, jetait sur les fautes graves de certains de ses ministres le manteau de Noé ? Etonnez-vous donc qu’on s’émeuve, qu’on s’indigne, qu’on se gausse !

Tiens, ça vaut bien qu’on s’en remette un p’tit couplet :

« A Paris les vieilles bigotes / Marchent toujours les yeux baissés/ C’est pour voir dans not’ culotte/ Si l’ chinois n’est pas dressé. ! »

Amen.

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