Hors de la cage

À travers un portrait de Lucien Léger, Didier Martiny entame une réflexion sur les longues peines.

Jean-Claude Renard  • 18 octobre 2007 abonné·es

En juillet 1964, Lucien Léger est arrêté, incarcéré et jugé pour le meurtre d’un enfant. Il a 27 ans. Le crime ébranle l’opinion publique. La foule réclame sa tête. «~L’étrangleur~», comme il s’est lui-même surnommé dans ses lettres, devient l’ennemi public numéro un. En mai 1966, défendu par Albert Naud, il est condamné à la réclusion criminelle à perpétuité. Il passe quarante et un ans et trois mois derrière les barreaux. C’est la plus longue peine jamais effectuée en France. Après quatorze demandes rejetées, Lucien Léger obtient sa libération conditionnelle en octobre 2005. Il a 68 ans, et trouve refuge dans un village près de Douai.

Quel homme est-il devenu ? C’est la question que pose le réalisateur, Didier Martiny, ponctuant son documentaire d’images d’archives.

Dans sa chambre, Léger a reconstitué l’univers de sa cellule. Il a suspendu les vêtements qu’il portait le jour de son arrestation. Des portraits de Rimbaud, de Ferré. Ni dieu ni maître. Ni en prison ni dehors. Son credo~: «~Rester debout et s’inventer des combats.~» Léger n’est pas un homme abattu. L’étrangleur s’est mué en phénix. Mais il est un cas à part. Et l’occasion pour le réalisateur de s’interroger sur les longues peines, institution qui détruit plus qu’elle ne répare, psychologiquement, physiquement.

Quel est le sens de la perpétuité quand le temps de l’incarcération s’étire sans utilité, dans la béance, sans réel travail de réinsertion~? Lucien Léger est-il lavé de son crime après autant d’années de taule~? Ou toujours considéré coupable~? Les habitants de son village ne se posent pas de questions. « Sa place était de rester en prison, ou d’être tué » , s’exclame une villageoise. Ça donne le ton de la connerie ambiante et des mentalités calées dans un cul de basse-fosse.

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