L’Extrême Droite (Suite)

Sébastien Fontenelle  • 13 janvier 2010
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L’Extrême Droite (Suite)

La vie, je crains, va devenir un peu compliquée, pour Besson.

Besson est, je rappelle, d’un parti, au sens large, que nous appellerons, pour faire vite (et parce que ça lui va bien au teint, qu’il a nettement blafard) le parti réactionnaire, et dont les interchangeables clercs d’accompagnement pratiquent depuis moult an un chantage, impuni, au nazisme et à l’antisémitisme, amalgamant avec l’hitlérisme tout ce qui heurte leur(s) dogmatisme(s) d’airain – sans que jamais, toutefois, Besson n’ait envisagé de les faire traduire en justice.

(Bien au contraire, comme on se disait l’autre jour: après avoir menacé de poursuivre Alain Finkielkraut, qui lui avait imputé, par un coutumier raccourci, un «lapsus fasciste» – rien que ça -, Besson avait en fin de compte renoncé à saisir les tribunaux.

Il est vrai qu’il avait alors abandonné la gauche – ou du moins les «socialistes» – pour le parti réactionnaire, dont le Chef Suprême (devenu depuis celui, aussi, de l’État français) juge qu’Alain Finkielkraut «fait honneur à l’intelligence française» – laquelle, tarée à de telles aunes, perd assurément quelques rais de sa luminosité.)

Pour autant: Besson a récemment prévenu (et promis, fermement) que désormais il attaquerait, pour de bon, toute personne qui, usant du même procédé comparatif dont le parti réactionnaire abuse depuis tant d’ans (mais avec de bien plus solides points d’appui et de comparaison), aurait le front (populaire) d’assimiler son cheminement politique (et tout aussi bien son empressement à servir la chefferie de l’État français en boutant le métèque) aux cheminements et empressements, naguère, des sieurs Déat, Doriot, Laval.

Une telle promesse engage, et, tiens, justement: diverses personnalités viennent ce soir de signer un «appel contre l’indignité» , que Le Monde publie, que je t’invite à lire, et qui précisément commence par le rappel, historiquement rigoureux, que «Doriot, Déat, Laval ont, en leur temps, fourbi leurs armes du côté gauche de l’échiquier politique avant de rallier le bord opposé» , et qui se poursuit par le rappel, non moins factuellement vrai, que «Besson a, en son temps, fourbi ses armes du côté gauche de l’échiquier avant de rallier le bord opposé» .

Pour laver cet affront, Besson va donc devoir, si du moins ses mots ont du poids, ester demain contre les signataires de cette comparaison, qui aggravent leur cas en relevant que si «nul n’a pu freiner la course de Doriot, Déat et Laval vers les dérives que l’on sait» , ils entendent, pour ce qui les concerne, « arrêter Éric Besson, pas pour lui-même, mais pour la République» .

(J’entends d’ici les cris d’orfraie que vont pousser nos experts ès-chantage au nazisme du parti réactionnaire, comment, comment, comment osent-ils – et n’ont-ils donc pas de pudeur?)

Nous devons par conséquent nous attendre à ce que Besson dépose demain des plaintes contre: John Berger, Enki Bilal, Didier Daeninckx, Dan Franck, Jean Vautrin, Chantal Akerman, Josiane Balasko, Samuel Benchetrit, Laurent Cantet, Élie Chouraqui, Philomène Esposito, Didier Haudepin, Cédric Klapisch, Philippe Lioret, Nicolas Philibert, Jérôme Prieur, Claire Simon, Bertrand Tavernier, Paul Veyne – scusez du peu.

En soi, déjà: c’est divertissant.

Mais le plus intéressant est que manifestement, quelque chose a changé, depuis quelques temps: il devient en effet possible (ou à tout le moins envisageable), si j’en crois ce qui s’écrit désormais ça et (et nonobstant l’effort conjoint que fournissent l’hebdomadaire Marianne et le philosophe Bernard-Henri Lévy pour interdire cette énonciation de l’évidence), de nommer la droite régimaire qui prétend régner sur nos vies pour ce qu’elle est – une droite qui «n’est pas juste la droite» , mais une droite extrême , une droite ultra , dont chacun peut à présent voir que la seule promesse qu’elle ait pour de bon tenue est celle, tacite, qu’elle gaverait aux frais du gueux la possédance, et qui dès lors n’existe plus que par l’excitation maladive des phobies dégueulasses de son électorat.

Une droite qui, par maint aspect, rappelle assurément celle des années 1930 – une droite qui, par exemple, nourrit, sur l’ «islamo-gauchisme» , la même paranoïa que nourrissait naguère la droite sur le «judéo-bolchevisme» .

Il faut bien sûr continuer à documenter cette parenté.

Il faut bien sûr continuer à montrer le véritable visage du parti réactionnaire – au-delà du simple constat, récurrent désormais jusque dans les pages du Monde , car tellement évident (et en même temps si gentillet, encore), qu’il «maraude» sur les terres péniques.

Et puis évidemment: il faudra quand même en tirer un de ces matins les conclusions – histoire de pas laisser penser à un monde écoeuré que nous supporterons trop longtemps ce contre quoi nous avons manifesté, rappelle-toi, en 2002.

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