Le temps des impostures

Une grande tragédie politique mise en scène par Christophe Perton à Valence.

Gilles Costaz  • 26 avril 2007 abonné·es

La Comédie de Valence fait faire une courte tournée au dernier spectacle de son metteur en scène et directeur, Christophe Perton. Dans Hop là, nous vivons !, écrit par Ersnt Toller, Perton retrouve l’acuité parfaite dont il faisait preuve en montant, il y a quelques années, Les gens déraisonnables sont en voie de disparition, de Peter Handke. La pièce de Toller, peu connue, bien que déjà jouée en France, et quoique Chéreau ait beaucoup contribué à la connaissance de cet auteur allemand, s’avère une oeuvre capitale dans l’histoire du théâtre européen.

Un révolutionnaire, condamné à mort, est gracié. Il n’en est pas moins tenu à l’écart de la société car il passe huit ans enfermé dans un hôpital psychiatrique. Enfin relâché, il découvre que l’un des ministres importants du gouvernement est l’un de ses camarades, qui fut comme lui condamné à mort. Il lui rend visite : l’ancien militant a accepté toutes les compromissions, et pratique une politique de répression de la classe ouvrière. Le révolutionnaire sincère punirait bien le traître, s’il le pouvait. Mais, hagard, étranger, ahuri, il part mener une existence de survie jusqu’à ce que sa destinée le propulse dans un autre malentendu, mortel celui-là.

Hormis quelques clins d’oeil un peu faciles à l’actualité électorale, la mise en scène est d’une fascinante intensité, sachant emmener dans un même mouvement un grand nombre d’interprètes, le langage du théâtre et celui d’une vidéo combinant images d’actualité et images mentales. Gauthier Baillot, dans le rôle central, confirme, par sa présence à la fois puissante et étrange, qu’il est l’un des grands jeunes acteurs d’aujourd’hui. Il a d’excellents partenaires, comme Vincent Garanger (en traître à la personnalité si double) et Pauline Moulène. Voilà l’une de ces grandes et rares soirées éclairantes qui tranchent à vif dans une histoire à l’amer goût de présent.

Culture
Temps de lecture : 2 minutes