Quatre nuances de rose

Les premières propositions des quatre candidats issus du PS révèlent quelques divergences propres à susciter le débat.

Michel Soudais  • 24 août 2016 abonné·es
Quatre nuances de rose
© Photo : DOMINIQUE FAGET / AFP

Quatre candidats pour s’opposer à François Hollande, c’est assurément deux ou trois de trop pour espérer battre le chef de l’État dans une primaire. Abstraction faite de cette donnée d’arithmétique électorale, les candidatures d’Arnaud Montebourg, de Benoît Hamon, de Marie-Noëlle Lienemann et de Gérard Filoche incarnent des approches certes voisines, mais avec leurs différences. En cela, elles ne sont pas illégitimes.

À ce stade, leurs stratégies divergent. Marie-Noëlle Lienemann et Benoît Hamon entendent concourir à la primaire de la Belle Alliance populaire, initiée par le PS, tandis qu’Arnaud Montebourg laisse planer le doute sur sa participation. Quant à Gérard Filoche, il entend participer à une primaire « de toute la gauche ».

En matière programmatique, les candidats n’ont présenté encore que des esquisses. Le « Projet France » de Montebourg s’articule autour de cinq « défis » : le redécollage de l’économie française et européenne, la lutte contre le terrorisme, le sauvetage de l’Europe, la refondation du système démocratique, la mutation écologique. Mais il doit encore intégrer des contributions. Benoît Hamon, qui a dévoilé quelques points de son programme, réunit ses amis le week-end prochain à Saint-Denis (93) pour « fabriquer les solutions qui dessineront […] les chemins de l’espérance ». Marie-Noëlle Lienemann a listé quinze propositions dans un document publié le 15 août, dans l’attente d’un programme complet annoncé en décembre. Gérard Filoche, qui a pris pour slogan « le social au cœur », s’en tient lui à un programme minimum – « 1 800 euros pour le Smic, 32 heures hebdomadaires, 60 ans pour la retraite, et pas plus d’écart de 20 fois le salaire ». Il reste « ouvert » après à une transition écologique et à un changement vers une 6e république…

Ces esquisses présentent quelques points communs. Benoît Hamon prône par exemple un Parlement avec « moins de députés », et « un Sénat qui pourrait être fusionné avec le Conseil économique social et environnemental » (CESE) dans l’objectif de « contrôler l’action de l’exécutif ». Arnaud Montebourg, lui, envisage de limiter à 350 le nombre de députés, dont 70 élus à la proportionnelle intégrale ; il assigne au Sénat un rôle de « contrôle de l’argent, des engagements et des promesses publiques » et « d’évaluation des lois avant qu’elles ne soient adoptées », et souhaite limiter à 200 le nombre de sénateurs, dont 100 seraient des citoyens tirés au sort, le complément étant fourni par 100 membres du CESE, lequel disparaîtrait.

Mais le député des Yvelines se distingue de son ancien collègue de Bercy sur plusieurs points : reprise du « processus continu de réduction du temps de travail », volonté partagée par Gérard Filoche et Marie-Noëlle Lienemann, laquelle avance l’idée d’une sixième semaine de congés payés et des « négociations de branche sur la semaine de quatre jours » ;mise en œuvre d’un « revenu universel d’existence », ou développement des « formes alternatives d’entrepreneuriat ». Benoît Hamon propose également de légiférer sur le cannabis, sujet où « on surjoue la fermeté », il estime que « la légalisation et l’encadrement de la distribution du cannabis peuvent être une solution ». Interrogé sur la polémique autour du burkini, il plaide pour « une laïcité sans épithète ». L’islam « n’est pas une sous-religion que l’on traite par le biais post-colonialiste ou une religion dont on considère qu’elle est un nid permanent de terroristes par le biais sécuritaire », a-t-il déclaré sur France Inter, le 17 août.

Quand Arnaud Montebourg annonce son intention de « renégocier » la loi travail, Benoît Hamon souhaite l’« abroger », et Marie-Noëlle Lienemann propose de « rétablir » la hiérarchie des normes et le principe de faveur. La différence n’est pas mince. Tout comme en matière d’écologie. Là où Montebourg se contente d’en insuffler un zeste dans son projet « socialiste, mais pas seulement » – puisqu’il puise aux sources du gaullisme social et économique – Hamon appelle à « changer de modèle de développement » et refuse de continuer à « sacrifier » le code du travail, des milliards d’argent public, mais aussi notre environnement « pour courir après un demi-point de croissance ».

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