Une émotion très sélective

Si l’attaque du Hamas contre Israël est un acte terroriste, le traitement des Palestiniens par Israël l’est aussi. Et Emmanuel Macron s’en accommode très bien.

Sébastien Fontenelle  • 10 octobre 2023
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Une émotion très sélective
Des Palestiniens pleurent la mort de leurs proches à la suite d'une frappe aérienne israélienne sur le camp de réfugiés de Jabalia, dans la bande de Gaza, le 9 octobre 2023.
© Mahmoud HAMS / AFP

Le Hamas a donc lancé samedi 7 octobre, depuis la bande de Gaza, une attaque d’envergure contre Israël. Aussitôt, Emmanuel Macron, chef de l’État français, a confectionné un post (1) pour, d’une part, « condamne(r) fermement », et à l’unisson de la presque totalité des chef·fes d’État de « l’Occident (2) » et de leurs journalistes d’accompagnement, « les attaques terroristes » ayant « frappé Israël », et pour, d’autre part, « exprime(r) » sa « pleine solidarité avec les victimes, leurs familles et leurs proches ».

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Puisque tel est le nouveau nom des tweets.

Qu’est-ce que le terrorisme ? C’est d’abord, nous dit le dictionnaire, l’« ensemble des actes de violence qu’une organisation politique exécute dans le but de créer un climat d’insécurité » : cela correspond assez bien à l’attaque lancée par le Hamas. Mais ce même dictionnaire propose également cette autre définition : le terrorisme, explique-t-il, est aussi l’« emploi systématique par un pouvoir ou par un gouvernement de mesures d’exception et/ou de la violence pour atteindre un but politique ».

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Comme on dit quand on se sent occidental·e.

Question 1 : est-ce que le gouvernement israélien emploie systématiquement des mesures d’exception contre les Palestinien·nes ? Réponse : absolument.

Selon le rapporteur spécial des Nations unies sur la situation des droits humains dans les territoires palestiniens occupés depuis 1967, en effet, cette situation s’apparente, comme le constatent également la plupart des grandes organisations internationales de défense desdits droits, à un « apartheid ». C’est-à-dire, toujours selon le dictionnaire : à un « régime de ségrégation systématique ». C’est-à-dire : à des mesures d’exception portées à leur plus haut degré d’intensité.

Nous savons que l’hôte de l’Élysée sait parfaitement s’accommoder de certaines terreurs d’État.

Question 2 : est-ce que le gouvernement israélien emploie régulièrement la violence contre les Palestinien·nes ? Cela non plus n’est pas douteux : on se rappelle que l’armée israélienne a notamment tué plusieurs centaines de civil·es – dont des enfants – à Gaza en 2009 dans le cadre de l’opération « Plomb durci », puis qu’elle a de nouveau perpétré un massacre de masse au même endroit en 2014, sous le couvert de l’opération « Bordure protectrice ». (Et l’on sait que ces temps-ci elle était affectée à la protection des colons qui s’adonnent à la persécution ordinaire des Palestinien·nes.)

Mais rien de tout cela ne semble choquer M. Macron, qui, plutôt que de les dénoncer pour ce qu’ils sont, continue de soigner sa relation avec le très droitier personnage sous qui ces crimes sont perpétrés : Benyamin Netanyahou. On ne s’en étonnera pas, car il y a beau temps que nous savons que l’hôte de l’Élysée (3) sait parfaitement s’accommoder de certaines terreurs d’État : nous le revérifions à chaque fois qu’il déroule des tapis rouges devant des massacreurs
de civil·es – qui se trouvent être aussi de fidèles clients de l’industrie française de l’armement.

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Comme l’appelle la presse comme il faut.


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Publié dans
De bonne humeur

Sébastien Fontenelle est un garçon plein d’entrain, adepte de la nuance et du compromis. Enfin ça, c’est les jours pairs.

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