Seine-Saint-Denis : la protection de l’enfance en danger

Les juges pour enfants du 93 ont lancé lundi 5 novembre un appel au secours.

Politis  • 8 novembre 2018
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Seine-Saint-Denis : la protection de l’enfance en danger
photo : tribunal de grande instance de Bobigny. Crédit : GEOFFROY VAN DER HASSELT / AFP

C’est bien une « alerte », un « appel au secours » que les juges pour enfants du département de Seine-Saint-Denis ont lancé lundi 5 novembre dans Le Monde (daté du mardi 6) et sur France Inter. Un texte incisif, froid, déterminé, signé du président du tribunal pour enfants de Bobigny, Thierry Baranger, et de ses quatorze magistrats. Entre pénuries de moyens et d’agents – il manquerait au moins neuf postes à temps plein –, les juges de ce tribunal, le deuxième de France, décrivent une situation préoccupante, en premier lieu pour les enfants, pourtant soumis à l’Ordonnance de 1945 censée les sanctionner mais surtout les protéger. Or les deux domaines de la mission des magistrats sont durement affectés par cette véritable disette en termes de conditions de travail et de moyens, et surtout par l’engorgement du tribunal.

En matière pénale d’abord, par manque de greffiers, les décisions sont notifiées dans des délais d’environ un an, « ce qui leur ôte véritablement leur sens, dans un département où les actes de délinquance sont nombreux ». Mais c’est dans le domaine (civil) de la protection des mineurs que la situation est la plus déplorable. Chargés de mettre à l’abri les mineurs (parfois très jeunes) en danger du fait de violences ou de carences de soins et d’éducation de la part de leurs proches, les magistrats peuvent, dans les cas les plus lourds, les confier immédiatement via l’Aide sociale à l’enfance (ASE) à une association habilitée. 

Ces placements en urgence semblent heureusement exécutés correctement le plus vite possible. Mais, dans le cas de mesures éducatives en milieu ouvert, les magistrats déplorent des délais pouvant aller de quinze jusqu’à dix-huit mois entre la date de leur prise de décision et son application. 900 dossiers seraient en attente aujourd’hui. Triste record. Ce qui fait écrire aux magistrats signataires qu’ils sont devenus « les juges de mesures fictives » ! Interrogée sur France Inter, la garde des Sceaux, Nicole Belloubet, a rappelé que « la mise en œuvre des décisions de nature civile appartient au département ». Alors que l’on sait que l’État ne cesse de diminuer leurs dotations financières…

Les échos
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