Monkeypox : Aides appelle à la vigilance

Ce virus mal connu se répand de façon exponentielle et touche particulièrement la communauté gay masculine en Île-de-France. Les associations de lutte contre le sida sont en alerte.

Olivier Doubre  • 6 juillet 2022 abonné·es
Monkeypox : Aides appelle à la vigilance
© KATERYNA KON/SCIENCE PHOTO LIBRA / KKO / Science Photo Library via AFP

Et maintenant, la « variole du singe » ou monkeypox. Si le nom de cette maladie commence à être connu, ses symptômes le sont beaucoup moins. Apparu en Afrique centrale, entre République du Congo et Nigeria, où il a commencé à devenir endémique chez les humains à partir des années 1970, ce virus se propage désormais massivement en Europe, même s’il a été détecté pour la première fois au Danemark en 1958. Depuis deux mois et les premiers cas détectés hors d’Afrique, des épidémiologistes produisent des courbes de projection de son expansion – à caractère exponentiel –, à l’échelle planétaire. Les modes de contamination semblent essentiellement des contacts « peau à peau », avec les fluides biologiques ou des surfaces contaminées, sans que l’on connaisse exactement la dose infectieuse. Une communauté réduite mais ayant des contacts rapprochés peut donc aisément se transformer en cluster.

Ainsi, comme dans de nombreux pays, Santé publique France (SPF) relève que la prévalence est particulièrement élevée parmi le groupe des hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes (HSH), avec des signes cliniques qui diffèrent de ceux enregistrés dans les zones endémiques d’Afrique : « éruptions cutanées buccales, génito-anales, ou sur une autre partie du corps… » Xavier Lescure, l’un des infectiologues en charge du dossier à l’hôpital Bichat à Paris, n’hésite pas à associer le « mode de transmission propre à cette épidémie et la communauté qui porte cette transmission », soulignant que « le principal facteur de risque aujourd’hui est le multipartenariat sexuel ». Selon SPF, plus de 600 cas seraient actuellement recensés en France (plus de 7 000 dans le monde), dont depuis peu des femmes et des enfants, particulièrement à risque de formes graves, suscitant l’inquiétude de l’OMS, qui se refuse pourtant à déclarer l’urgence sanitaire. Des caractéristiques qui ne peuvent que rappeler le précédent de l’épidémie de VIH, d’abord qualifiée dans les médias de « cancer gay »… avant de se diffuser au reste de la population.

Les stocks de vaccins disponibles sont très limités.

Créée autour de Daniel Defert, l’ancien compagnon du philosophe Michel Foucault, l’une des premières personnalités connues décédées en France du sida en juin 1984, l’association Aides ne peut que s’inquiéter face à l’apparition d’une telle épidémie, dont les caractéristiques résonnent étrangement avec les premiers souvenirs du VIH. Sauf que les données scientifiques et cliniques, pour limitées qu’elles soient encore, se différencient grandement : en premier lieu du fait de l’existence d’un vaccin (dénommé Imvanex en France), déjà proposé de façon préventive au Canada, en Allemagne et, depuis le 23 juin, à New York. Mais aussi que la maladie n’apparaît pas mortelle (aucun décès n’ayant été déploré en Europe), ses symptômes s’apparentant plutôt « à une très grosse varicelle », selon l’actuelle présidente d’Aides, Camille Spire, qui prend néanmoins les choses au sérieux. « On reçoit un certain nombre d’appels de personnes, la plupart gays, inquiètes devant l’inconnu que représente cette nouvelle épidémie. Certaines ont vécu l’époque du sida, mais d’autres sont bien plus jeunes. »

Reste que les stocks de vaccins disponibles sont très limités puisque la maladie était quasi inexistante en Europe. À tel point qu’en France l’information sur leur nombre a été classée secret-défense. Camille Spire estime que cela « s’explique sans doute par le fait que le renouvellement des stocks demande du temps ». Et la présidente d’Aides de souligner que « la nécessité d’une vaccination préventive et générale de toute la population n’est pas la réponse la plus pertinente », mais que son association « mène campagne pour une vaccination des populations à risque, en premier lieu les homosexuels masculins ayant plusieurs partenaires, comme l’ont déjà fait le Canada, le Royaume-Uni ou l’Allemagne, mais aussi les acteurs de prévention et les personnes déjà très immunodéprimées ». Camille Spire se demande si la lenteur de la réaction des autorités « n’est pas aussi une manière de gérer la faiblesse des stocks », mais reconnaît que, sur ce dossier, « l’État et le pouvoir médical sont à l’écoute – contrairement à ce qui s’est produit avec le covid-19 – des associations et des acteurs de terrain ».

Société Santé
Temps de lecture : 4 minutes

Pour aller plus loin…

Dans la Loire, le médicobus arpente les déserts médicaux
Reportage 17 octobre 2025 abonné·es

Dans la Loire, le médicobus arpente les déserts médicaux

Dans l’agglomération de Roanne (42), un cabinet médical mobile propose des consultations sur les places de plusieurs villages. À son bord, défilent des habitants de tous les âges privés d’accès à un médecin traitant et témoignant de leurs difficultés face à un système de santé défaillant.
Par Baptiste Thomasset
À Paris, un conducteur percute deux personnes lors d’une manifestation de sans-papiers
Racisme 17 octobre 2025 abonné·es

À Paris, un conducteur percute deux personnes lors d’une manifestation de sans-papiers

Vendredi 10 octobre, un homme en voiture a percuté des manifestants lors d’une mobilisation organisée par un collectif de sans-papiers à Paris. Deux hommes ont été blessés et ont porté plainte. Malgré leurs témoignages, la police a retenu l’infraction de « blessures involontaires ».
Par Pauline Migevant
À Rouen, l’académie refuse de scolariser des mineurs isolés et à la rue
Reportage 16 octobre 2025 abonné·es

À Rouen, l’académie refuse de scolariser des mineurs isolés et à la rue

Malgré un droit constitutionnel adoubé par la convention des droits de l’enfant, la scolarisation est une bataille au quotidien pour les jeunes exilés de la plus grande ville de Seine-Maritime. Depuis plusieurs mois, ils luttent face au refus de l’académie de les scolariser.
Par Louis Witter
« Plan social déguisé » : 20 salariés d’un sous-traitant d’Amazon contestent leur licenciement
Luttes sociales 15 octobre 2025 abonné·es

« Plan social déguisé » : 20 salariés d’un sous-traitant d’Amazon contestent leur licenciement

Licenciés pour faute il y a un an, ils ont décidé d’attaquer cette décision auprès des prud’hommes de Marseille, ce mercredi. En cause : le refus d’être mutés à plus de 130 kilomètres de leur lieu travail suite à la perte d’un contrat avec Amazon.
Par Pierre Jequier-Zalc