Assistanat bien ordonné

Celui qui fustige « le cancer de l’assistanat » n’hésite pas à profiter généreusement des deniers publics, comme le prouve sa récente escapade au Japon.

Sébastien Fontenelle  • 24 avril 2024
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Assistanat bien ordonné
Laurent Wauquiez, à Lyon, le 19 octobre 2023.
© JEFF PACHOUD / AFP

M. Laurent Wauquiez appartient, comme on sait, au parti de M. Éric Ciotti, Les Républicains – qui s’est tant et tant droitisé, dans les dernières années, qu’on peut avoir des fois du mal à bien le différencier du Rassemblement national. M. Laurent Wauquiez serait même, pour ce que l’on en sait, le candidat putatif dudit parti pour la prochaine élection présidentielle, qui aura lieu en 2027.

C’est beaucoup, mais ce n’est pas tout, puisque M. Laurent Wauquiez est aussi le président de la région Auvergne-Rhône-Alpes, où il se plaît à donner de grands coups de sabre dans les subventions régionales allouées aux institutions culturelles qui n’ont pas l’heur de lui plaire (car il les juge par trop « wokistes »), mais où il a tout de même épargné, comme le relevait l’autre semaine Le Canard enchaîné, le Festival de musique de La Chaise-Dieu – qui se trouve être géré, selon l’hebdomadaire satirique, par une association où siège, amusante coïncidence, son épouse Charlotte Wauquiez.

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Puis enfin, et surtout, et parmi beaucoup d’autres qualités encore : M. Laurent Wauquiez fut l’auteur, en 2011, d’une virulente fustigation publique de ce qu’il appelle, sous le sceau de cette instinctive élégance verbale et morale à quoi se reconnaît immanquablement le politicien de grand goût, le « cancer » de « l’assistanat » – vocable qui a ceci de particulier qu’il n’est pas seulement terrible pour les bénéficiaires des minima sociaux (et autres allocations de survie), implicitement soupçonné·es de se complaire dans la pauvreté, mais l’est tout autant pour les victimes du cancer, dont il suggère qu’elles auraient fait le choix de la maladie, et pour leurs proches (1).

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Onze ans plus tard, en 2022, M. Laurent Wauquiez, tout à fait content de lui, avait crânement revendiqué la clairvoyance qu’il y avait, selon lui, dans cette profération.

Depuis cela, de loin en loin, on a quelques nouvelles de M. Laurent Wauquiez. L’an dernier, par exemple, on avait appris, par Mediapart, qu’il avait organisé au mois de juin 2022, dans un château de sa région, un fastueux « dîner des sommets » qui avait coûté plus de 100 000 euros d’argent public aux contribuables auvergnat·es, rhodanien·nes et alpin·nes – et qui fait l’objet d’une enquête du parquet national financier.

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Et, la semaine dernière, on a de même appris, dans Le Monde, qu’une récente – mais fort discrète – escapade japonaise durant laquelle M. Laurent Wauquiez a notamment fait un crochet par les « cossues stations de ski de Kiroro et Niseko » avait été « entièrement prise en charge par la très discrète agence Auvergne-Rhône-Alpes entreprises (ARAE) », qui a « un budget annuel de 18,6 millions d’euros, dont 15,2 millions d’euros subventionnés par la région ».

À Dieu ne plaise qu’on use des mêmes rebutantes métaphores médicinales que M. Laurent Wauquiez : on risquerait de se laisser aller à trouver à certaines affaires des airs de métastases.

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De bonne humeur

Sébastien Fontenelle est un garçon plein d’entrain, adepte de la nuance et du compromis. Enfin ça, c’est les jours pairs.

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