Comme Le Pen aurait fait

À chaque fois que Gérard Collomb fait donner la troupe, c’est en vérité le chef de l’État qui contresigne ces brutalités.

Sébastien Fontenelle  • 6 juin 2018 abonné·es
Comme Le Pen aurait fait
© photo : Alain JOCARD / AFP

M****atteo Salvini, nouveau ministre italien de l’Intérieur, qui vient de l’extrême droite (Ligue), a déclaré hier qu’il fallait maintenant que les migrant·e·s réfugié·e·s dans son pays « fassent leurs valises ». Question : où va-t-il chercher tout ça ? (Où diantre va-t-il chercher toute cette sordidité ?)

Réponse (facile) : Salvini prend son inspiration dans la logorrhée de son homologue françousque – l’ex-« socialiste » Gérard Collomb (1), qui met dans la profération de ces méchancetés un tout petit peu moins de rude grossièreté (et beaucoup plus de cautèle, donc), mais dont, au fond, l’avis, en de telles matières, ne diffère nullement de celui des ligueux d’outre-Alpes, puisqu’il avait, par exemple, au mois de décembre 2017, demandé aux préfets (2) d’« accélérer les expulsions de migrant·e·s » (3).

Et il est certes sain de se scandaliser des inconvenances et vilenies de ce personnage – lorsqu’il explique, par exemple, toute décence bue, que les migrant·e·s qui fuient la misère et la mort font du « benchmarking ».

Mais en vérité : il est bien évident que Gérard Collomb ne dit ni ne fait rien qui n’ait d’abord reçu l’aval – et partant les encouragements – d’Emmanuel Macron, qui l’a mis dans Beauvau il y a plus d’un an puis maintenu dans ses fonctions.

Pour le dire autrement : à chaque fois que Gérard Collomb fait donner la troupe contre des migrant·e·s – comme Le Pen aurait sans doute fait si elle avait été élue en lieu et place dudit Macron –, à chaque fois que Gérard Collomb fait donner la troupe contre des étudiant·e·s – comme Le Pen aurait sans doute fait si elle avait été élue –, à chaque fois que Gérard Collomb fait donner la troupe contre des zadistes – comme Le Pen aurait sans doute fait si elle avait été élue –, c’est en vérité le chef de l’État qui contresigne ces brutalités (4) – où son ministre de l’Intérieur n’est qu’un (servile) exécutant.

Pour le dire encore autrement (et en gardant à l’esprit que tout ne se vaut toujours pas) : il sera vraiment très difficile, à la prochaine présidentielle, d’appeler à construire un barrage contre l’extrême droite en revotant, fût-ce la mort dans l’âme, pour le sinistre président, qui depuis son installation dans l’Élysée fait faire par ses polices, et avec un cynisme qui dans des temps récents ne s’était jamais vu (5), les mêmes sales boulots dont elles auraient sans doute été mêmement chargées si Le Pen avait été élue.

(1) Dont le nom, je le sais, te donne très envie de faire des rimes – mais rappelle-toi, je te prie, que : n’est pas Du Bellay qui veut.

(2) À qui l’État français aime déléguer, décidément, dans les siècles des siècles, ses œuvres les plus basses.

(3) Ouest-France, 5 décembre 2017.

(4) Comme il opine, de fait, par ses silences – qui ne dit mot consent –, aux violences fascistes – contre les étudiant·e·s, derechef, ou les migrant·e·s – qui désormais rythment l’époque, tout comme cela se serait sans doute produit si Le Pen avait été élue.

(5) Pas même sous Sarkozy – ou sous le terrible Valls.

Publié dans
De bonne humeur

Sébastien Fontenelle est un garçon plein d’entrain, adepte de la nuance et du compromis. Enfin ça, c’est les jours pairs.

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